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Tunisie : Le secteur de leasing est-il menacé dans sa pérennité ?

ISIN : TN0009050014 - Ticker : PX1
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Par Moez Hadidane

La compétition à la liquidité et la hausse successive des taux d'intérêt face au plafonnement du taux de sortie sont à l'origine de la dégradation des résultats du secteur. Au 30 juin 2019, et sur une base sociale, le coût du risque explose à 37% et la masse bénéficiaire chute de 89%. Analyse. 

En l'espace d'une année, le taux directeur de la banque centrale (entre mars 2018 et Février 2019) a été relevé de 275 points de base, corrélativement, le TMM, principal taux de référence sur lequel est indexé la rémunération des ressources et de facturation des crédits du système financier est passé de 5,23% en décembre 2017 à 7,83% au mois de juin 2019, soit une augmentation de 260 points de base.

Ce constat conjugué à des contraintes règlementaires (respect du ratio de solvabilité, la non éligibilité au refinancement de la BCT, plafonnement des taux des crédits au Seuil du Taux Excessif -STE- etc..), à la conjoncture économique (ralentissement de la croissance, de l'investissement et des crédits), à des facteurs structurels caractérisés par l'atomicité du secteur et une concurrence accrue et enfin au tarissement de la liquidité avec en aboutissement l'effet d'éviction exercé par les banques, le secteur de leasing, irrité entre la hausse du coût des ressources et le plafonnement des taux de sortie, se trouve dans un goulot d'étranglement.

Réalisation financière du secteur en 2018 (comptes consolidés)

Le secteur de leasing est composé aujourd'hui de huit sociétés de leasing : Tunisie Leasing & Factoring (TLF), la Compagnie Internationale de Leasing (CIL), Arab Tunisian Lease (ATL), Attijari Leasing (Attij L), Modern Leasing (ML), Arab International Lease (AIL), Best Lease (BL) et Hannibal Lease (HL). Seule AIL, n'est pas cotée à la bourse de Tunis. D'un autre côté, seules TLF, Hannibal Lease et CIL publient des comptes consolidés.

Après une série haussière notamment de 20,9% en 2016 et de 18,3% en 2017, le Produit Net de Leasing (PNL) consolidé cumulé des huit (8) sociétés de leasing de la place a dévissé en 2018 de 2,7% comparé à l'exercice 2017 et de 14,7% comparé à 2016. A l'exception de CIL, TLF et AIL, toutes les autres sociétés de Leasing ont vu leur PNL se dégringoler, en particulier de ML (-34,8%).

En aval du PNL, et face au fardeau de l'alourdissement des charges opératoires et du coût du risque, la masse bénéficiaire consolidée du secteur s'est écroulée en 2018 de 19,5% (-11,3 millions de dinars) atteignant 46,5 millions de dinars après une croissance de 18,5% un an plutôt (+9 millions de dinars).

A l'exception de la CIL et AIL, toutes les compagnies de leasing ont vu leurs bénéfices reculés en 2018. Seule la CIL a réalisé une variation positive successive de son bénéfice en 2017 et 2018.

Réalisations financières du secteur au 30 juin 2019 (comptes sociaux)

Ce bilan s'est confirmé avec les résultats publiés au premier semestre 2019. Le PNL cumulé du secteur (base sociale et hors AIL) a dévissé au 1er semestre 2019 de 13,4% soit une contraction de -11,9 millions de dinars. Seule CIL (+0,67 millions de dinars) et ATL (+0,4 millions de dinars) ont dégagé une croissance positive de leur PNL intermédiaire arrêté au 30 juin 2019.

En amont des charges de dépréciation et de couverture des risques, l'EBITDA agrégé des sociétés de leasing (base sociale et cotées à la bourse) s'est fondue de 11,9 millions de dinars (-23%). Toutes les compagnies de leasing ont enregistré une baisse de leur EBITDA à l'exception de CIL (+0,53 millions de dinars soit +5,5%) et ATL (+0,15 Millions de dinars soit +1,8%). BH Leasing (Ex Modern Leasing) affiche au 30 juin 2019 un EBITDA négatif de 0,34 millions de dinars.

Coût du risque (base sociale) au 30 juin 2019

Au 30 juin 2019, le coût du risque mesuré par les " Dotations nettes aux provisions et résultat des créances radiées " comptabilisées par les sociétés de leasing cotées à la bourse a été multiplié par 2,5 fois, passant de 11,6 millions de dinars au 30 juin 2018 à 28,6 millions de dinars, soit un accroissement de 16,9 millions de dinars dont +10,5 millions de dinars proviennent de TLF.

En effet, TLF a constaté au 30 juin 2019 des Dotations aux provisions affectées pour dépréciation des créances pour un montant de 17,9 millions de dinars contre 5,15 millions de dinars au 30 juin 2018 (Pro-forma). Par conséquent les dotations nettes aux provisions et résultat des créances radiées ont totalisé 10,62 millions de dinars contre 0,15 millions de dinars au 30 juin 2018 et ce en dépit d'un changement de méthode comptable afférent au changement de taux de décote dont l'effet sur l'exercice 2019 s'est traduit par une reprise sur provisions de 3,48 millions de dinars.

Le coût du risque en pourcentage du PNL

En pourcentage du PNL, les dotations nettes aux provisions et résultat des créances radiées, ont bouffé au 30 juin 2019 : 37,1% du PNL du secteur contre 12,4% sur l'année 2018 et 9,6% en 2017.

Masse bénéficiaire

En aboutissement, la masse bénéficiaire (base sociale) des sociétés de leasing cotées à la bourse de Tunis s'est effondré au 30 juin 2019 de 89% passant de 25,4 millions de dinars au 30 juin 2018 à 2,8 millions de dinars au 30 juin 2019.

Les plus fortes baisses de résultat ont été enregistré par TLF, BH Leasing et Hannibal Lease. Seules ATL et Best Lease ont réalisé une variation positive de leurs bénéfices intermédiaires.

Quelles sont les causes de cette contreperformance ? Le secteur est-il menacé dans sa pérennité 

1. Ralentissement des crédits à l'économie 

Concours à l'économie

Les concours à l'économie du secteur de leasing (selon les dernières statistiques disponibles de la BCT défalquées par établissement de crédit) s'élèvent à fin mai 2019 à 4,6 Mrd de dinars en baisse de 2,5% par rapport à leur niveau fin 2018 (contre une progression de 1,6% pour le secteur bancaire). Le rythme d'évolution des concours à l'économie du secteur leasing a donc nettement ralentit comparé à leur croissance de 5% en 2018 et 21% en 2017.

A fin mai 2019, le secteur du Leasing assure 5,1% des concours à l'économise (crédits + titres) accordé par le système financier local contre 94,9% par le secteur bancaire (dont 14% au moyen du refinancement de la BCT).

Crédits à l'économie

Hors emplois en portefeuille titres, les crédits à l'économie du secteur leasing (4,4 Mrd de dinars) ont évolué depuis le début de l'année et jusqu'au mois de mai 2019 au rythme négatif de 2,5% contre une croissance de 4,7% en 2018 et 21,4% une année plutôt.

L'encours des crédits à l'économie du bancaire a évolué depuis le début de l'année de 1,3% (-0,2% hors refinancement de la BCT). La part de marché des sociétés de leasing dans les crédits accordés par le système financier passe de 5,6% en 2017 à 5,4% en 2018 et 5,1% au cinq premier mois de l'année 2019.

A noter que l'encours des opérations de leasing effectuées par les banques s'est élevé à fin mai 2019 à 1,05 Mrd de dinars, soit 24% des crédits bail accordé par les sociétés de leasing.

2. Contreparties éligibles au Refinancements auprès de la BCT

Conformément à l'article 10 de la loi n° 2016-35 du 25 avril 2016, portant fixation du statut de la Banque Centrale de Tunisie, seules les banques ont accès au refinancement de la BCT, et sont considérés en tant que contreparties éligibles. Par conséquent, les sociétés de leasing ne peuvent mettre en pension ou vendre à la BCT des effets publics ou toutes autres créances sur leurs clients.

3. Actifs éligibles au Refinancements auprès de la BCT

La Banque Centrale de Tunisie accepte comme garantie des opérations de refinancement, les actifs négociables incluant des titres de créances négociables publics et privés (la liste des actifs négociables éligibles est consultable sur le système CAER : Centrale des Actifs Eligibles au Refinancement) et les actifs non négociables matérialisant des créances bancaires sur les entreprises et les particuliers, conformément aux critères établis dans le cadre de la circulaire aux Banques N°2017-02 du 10 mars 2017. Les débiteurs de créances bancaires éligibles doivent être des entreprises non financières résidentes, des entités du secteur public ainsi que des personnes physiques résidentes ; par conséquent les banques ne peuvent présenter comme collatéral au refinancement auprès de la BCT des créances sur les sociétés de Leasing.

4. Renchérissement du coût des ressources

Coût et Structure des ressources

Au niveau des ressources, l'agrégation (à partir, des états financiers arrêtés au 31-12-2018) des " dettes et emprunts rattachés " des sociétés de leasing,  fait ressortir, au niveau de la structure des ressources, une dominance des crédits des banques locales: 34,8%, suivie par les emprunts obligataires : 31,3%,  viennent ensuite les titres de créances négociables ou TCN : 17,9% (Certificat de dépôts -CD-, certificats de leasings -CL- et Billets de Trésorerie -BT-), puis les lignes de financements extérieurs : 15,4% et enfin les titres participatifs : 0,5%.

Les ressources sous forme d'emprunts obligataires

Les dernières émissions d'emprunt obligataires (émises ou clôturées en 2019, dévoilent une montée des taux (pour les catégories à taux fixes et de maturité 5 ans) commençant par 10,6% pour la première émission clôturée durant l'année 2019 de TLF à 11,6% pour la dernière émission clôturée au mois d'octobre d'ATL. Pour les catégories de maturité 7 ans à taux fixes, les taux ont oscillé entre 11% et 11,7%.

Quant aux catégories à taux variable de maturité 5 ans, et compte tenu des TMM correspondants au mois de clôture de chaque émission, les taux équivalents, ont varié entre 9,78% à 11,4%. Pour le 7 ans, les taux variables ont évolué entre 10,24% et 10,83%.  Ainsi, le taux moyen pondéré ressort autour de 10,9%.

A titre comparatif, la dernière adjudication de BTA du 1er octobre 2019 a porté sur la souche " BTA 6,5% juin 2025 " assortie d'un taux de rendement actuariel de 9,844%, la ligne " BTA 7% Juillet 2028 " au taux actuariel de 9,809% et la ligne BTA 7,5% juillet 2032 au taux de 9,974%. La hausse des taux prescrits sur les émissions obligataires des sociétés de leasing est plus liée à la hausse du niveau général des taux dans l'économie (et qui trouve son origine principalement dans la sphère monétaire), que dans la dégradation de la qualité de signature des émetteurs.

Les notations accordées par Fitch Rating aux sociétés de leasings étant des notations nationales, en d'autres termes en monnaie locale, et donc des notations relatives. Elles reflètent la solvabilité d'un émetteur par rapport au meilleur crédit du pays et par rapport aux pairs opérant dans ce pays plutôt qu'une évaluation en absolue de la capacité générale de l'émetteur à honorer ses obligations financières.

Les notes en monnaies locales des sociétés de leasing tunisiennes se situent entre AA+ et BB-. A ce titre Fitch Ratings-Londres a abaissé d'un cran le 6 novembre 2019 la notation nationale à long terme de Hannibal Lease BB-. En même temps, Fitch a relevé la note d'Attijari Leasing d'un cran à BBB-.

Ressources sous forme de crédits bancaires

Pour ce qui est des emprunts bancaires, le taux d'intérêts des crédits des banques accordées aux sociétés de leasing varie entre TMM+2% et TMM+3%, soit l'équivalent actuellement de 9,8 et 10,8%. Certaines sociétés de leasing adossées à des banques peuvent bénéficier de taux plus compétitifs, autour de TMM + 1%. Les crédits bancaires représentent encore (au 31/12/2018) la principale source de financement des Leasers avec un part de 34,8%.

Ressources sous forme de TCN (titres de créances négociables)

L'alternative des TCN représente, au 31 décembre 2018 : 17,9% du total des ressources des sociétés de leasing. Les TCN sont assorties de taux d'intérêts relativement moins onéreux variant entre TMM +2% à TMM + 2,5%, soit entre 10 et 10,5%. Source de financement de plus court terme par rapport aux autres, ces ressources sont mobilisées en grandes parties auprès des entités du même groupe auquel appartient la société de leasing.

Ressources auprès des bailleurs de fonds étrangers

Il s'agit de financements accordés par des organismes financiers étrangers comme la BEI, BERD (Banque européenne pour la reconstruction et le développement), PROPARCO (filiale de l'AFD dédiée au secteur privé), BAD, SANAD (The MENA Fund for micro, Small, and Medium Entreprises -KfW Development Bank-) et la BIRD (Banque internationale pour la reconstruction et le développement – Groupe Banque mondiale).

Le taux d'intérêt négocié de ces emprunts, oscille entre de 3,5% et 5,0%, sans compter une prime de couverture contre le risque de change (de 400 à 650 points de base) : En effet, pour se prémunir contre le risque de change, les sociétés de Leasing souscrivent des contrats de couverture auprès du Fonds de Péréquation de Change (FPC : fonds public institué par la loi 98-111 du 28 décembre 1998 portant loi des finances pour l'année 1999) moyennant une prime de 400 points de base qui s'ajoutera au coût de l'emprunt. La forte baisse du dinar a mis en difficulté ledit fonds depuis le second trimestre 2018, et ce n'est, qu'au début de l'année 2019, que le fonds a repris son activité. Toutefois, les demandes de couverture sont désormais examinées au cas par cas, et la prime de couverture passe à 650 points de base au minimum, soit un coût (hors commissions d'étude et d'instruction de dossier) allant de 10 à 11,5%.

Au 31 décembre 2018, l'encours des financements extérieurs représentent 15,4% du total ressources.

Titres participatifs

Dans le cadre de la quête de ressources de financement de MLT respectant les règles de la finance islamique, Best Lease a procédé en 2018 à l'émission, sans appel public à l'épargne, de titres participatifs (in fine 7 ans) pour un montant de 7 millions de dinars assujetti d'un taux de rendement global de 8,5%.

En 2017, la société a émis également des titres participatifs pour un montant de 10,1 millions de dinars (in fine 7 ans) assortie d'un taux de rémunération global de 7%. Le cumul des fonds levés, soit 17,1 millions de dinars, sont comptabilisés par la société au niveau de ses fonds propres. Toutefois, compte tenu du terme de remboursement de 7 ans, nous avons classé ces ressources en tant que dettes.

Les causes et origines de la hausse du coût de financement

En résumé, compte tenu du poids sectoriel de chaque catégorie de financement, le coût moyen pondéré de mobilisation de ressources pour l'année 2019 des sociétés de leasing, est estimé autour de 10,7%, soit presque du TMM + 290 points de base contre un taux estimé fin 2017-début 2018 de 7,9% soit l'équivalent de TMM + 264 points de base.

Le Spread de crédit (la référence de la place étant le TMM et non la courbe souveraine) s'est donc élargi. Le spread de crédit, ou l'écart de taux actuariel par rapport au TMM mesure la somme d'une estimation de l'espérance mathématique du risque de défaut de l'emprunteur pendant la durée du prêt et d'une prime de liquidité, c'est-à-dire une estimation du coût de négociation de l'instrument. La hausse du Spread de crédit, reflète ainsi, en théorie, une perception croissante du marché, du risque de défaut et d'une plus grande exigence en termes de prime de liquidité.  En réalité, plusieurs autres facteurs expliquent la hausse du spread de crédit exigé dans le financement des sociétés de leasing.

  • D'abord, dans un contexte de tarissement de la liquidité, les banques sont de moins en moins prédisposées à accorder des crédits aux sociétés de leasing (créances non éligible au refinancement auprès de la BCT) ;
  • Pour ce qui est des emprunts obligataires (dette sénior ou mezzanine), les assurances et les OPCVM étaient historiquement les principaux souscripteurs, toutefois ils sont aujourd'hui de moins en moins prédisposés. Les assurances, dans un contexte de hausse des taux, préfèrent (dans la limite du catalogue de placement) investir sur le très court terme et dans des produits monétaires :
  • Les OPCVM, notamment ceux de catégorie obligataires, souffrent à leur tour de la décollecte des actifs sous gestion sous le fardeau de la concurrence des produits bancaires ;
  • Les banques sont de moins en moins motivées à souscrire des émissions obligataires du fait, dans un contexte de la raréfaction du cash, les sociétés de leasing sont perçues comme des concurrents directs dans la quête de la liquidité. De surcroit les banques exercent un effet d'éviction sur le leasing, dans la mesure où les investisseurs préfèrent, pour un écart de taux donné (prime de risque donnée), souscrire à une obligation bancaire qu'une, émise par une compagnie de leasing ;
  • Pour ce qui des emprunts obligataires subordonnés, et dans le cadre du respect des normes d'adéquation des fonds propres (ratio de solvabilité Tier II) par les banques et les établissements financiers, il est peu probable qu'une banque (ou une société de leasing) souscrit à un emprunt obligataire subordonné d'un autre émetteur, sous peine que le montant, de cette souscription, sera déduit de ses propres " fonds propres complémentaires " lors de la détermination du ratio de solvabilité Tier II.

5. Taux de sortie plafonné

En vertu de l'article 1er de la loi 99-64 du 15 juillet 1999, constitue un prêt consenti à un taux d'intérêt excessif tout prêt conventionnel consenti à un taux d'intérêt effectif global qui excède, au moment où il est consenti, de plus de 20% (tel que modifié par la loi 2008-56 du 4 août 2008) le taux effectif moyen pratiqué au cours du semestre précédent par les banques et les établissements financiers pour des opérations de même nature.

En application de la loi n° 99-64 du 15 juillet 1999, le décret n°2000-462 du 21 février 2000 a fixé les modalités de calcul du taux d'intérêt effectif global. Il est défini comme étant le taux d'intérêt appliqué par le prêteur à ses clients, augmenté des frais, commissions ou rémunérations de toute nature, directs ou indirects intervenus dans l'octroi du prêt. Il est calculé de la manière actuarielle et assure selon la méthode des intérêts composés, l'égalité entre, d'une part, les sommes prêtées et, d'autre part, l'ensemble des versements dus au prêteur au titre du prêt considéré.

Conformément à l'article 5 du décret n°2000-462 du 21 février 2000 : Pour chaque catégorie de crédits accordés, la Banque Centrale de Tunisie détermine semestriellement le taux d'intérêt effectif moyen à partir de la moyenne arithmétique simple des taux d'intérêts effectifs globaux observés durant le même semestre. Ce taux ainsi déterminé est utilisé au cours du semestre suivant pour la détermination du taux d'intérêt excessif (STE) prévu par l'article premier de la loi susvisée n° 99-64 du 15 juillet 1999.

Le ministre des finances procède, par arrêté, à la publication au Journal Officiel de la République Tunisienne des taux d'intérêt effectifs moyens ainsi que des seuils des taux d'intérêt excessifs correspondants qui serviront de référence pour le semestre suivant.

Conformément à l'arrêté du ministre des finances du 18 février 2019, le seuil du taux d'intérêt excessif qui servira de référence au 1er semestre 2019 pour les opérations de leasing est de 13,29%. Conformément à l'arrêté du ministre des finances du 29 juillet 2019, ce taux est relevé à 14,54%.

Au premier semestre 2019, le taux de sortie du secteur de leasing est estimé à 12,85% pour un seuil toléré de 13,29%. Compte tenu d'un coût moyen pondéré des nouvelles ressources mobilisées ou à mobiliser début 2019 de 10,7%, la marge d'intérêt du secteur s'élève à 215 points de base, en ligne avec les niveaux historiques enregistrés.

La grande différence est un déplacement vers le haut du corridor des taux [TMP des ressources ; TMP des sorties].  Cette marge doit couvrir les charges d'exploitation de la compagnie de leasing, les charges de couverture des risques de dépréciations des créances et l'impôt sur les sociétés.

La contraction du PNL trouve d'abord son origine dans un effet volume négatif. Les crédits à l'économie du secteur leasing (4,4 Mrd de dinars) ont évolué depuis le début de l'année et jusqu'au mois de mai 2019 au rythme négatif de 2,5% contre une croissance de 4,7% en 2018 et 21,4% une année plutôt.

La contraction du PNL (Produits Nets de Leasing) du secteur s'explique également du fait que la hausse des taux est transmise directement dans le coût des nouvelles ressources collectées, alors que les taux facturés à la clientèle sur les nouvelles mises en forces restent plafonnés durant tout un semestre au seuil du taux d'intérêt excessif. La répercussion ne se fait qu'après un temps de latence de 6 mois.

Les variations successives des taux sont à l'origine de la dégradation du PNL. La hausse des taux est répercutée, à terme, sur les taux de rémunération des nouvelles mises en force. Toutefois, le modèle de calcul du seuil du taux d'intérêt excessif (STE) est inapproprié puisqu'il est calculé à partir de la moyenne arithmétique simple des taux d'intérêts effectifs globaux observés durant le semestre précédent. Adopter une moyenne arithmétique simple, risque de biaiser la détermination du taux moyen. Par exemple une banque peut exercer des opérations de leasing de petits montants avec des taux inférieurs à ceux pratiqués par les autres sociétés de leasing et ainsi titrer vers le bas le taux moyen. Les opérations de leasing effectuées à travers les banques représentent 24% de l'encours du leasing en Tunisie.

Le défi majeur aujourd'hui, indépendamment de son coût est l'accès aux ressources et à la liquidité dans un contexte où le secteur connait une forte pression sur sa trésorerie. La liquidité de fin d'exercice tel qu'elle ressort de l'état de flux de trésorerie est déficitaire avec tout de même de grande disparité d'une compagnie à l'autre.

Autre défi, sous peine d'alourdir la facture du coût du risque, le secteur doit veiller à une allocation la plus optimale et la plus efficiente de ses ressources, de plus en plus rares, aux meilleurs projets dans une économie de plus en plus fragile, caractérisée par un net ralentissement de l'investissement et de la croissance.

Les crédits bruts à la clientèle des sociétés de leasing (base consolidée) ont totalisé en 2018 : 4 417 Millions de dinars enregistrant une hausse de 91,2 millions de dinars (+2,1%). Les engagements classés ont augmenté de 11,1 millions de dinars (compte non tenu de Best Lease) représentant 7,4% du total engament du secteur contre 7,2% en 2017.

En revanche, le taux de couverture s'est amélioré de 0,3 points de pourcentage à 66,2%.

L'absence de possibilité de refinancement direct ou indirect auprès de la BCT constitue le talon d'Achille du secteur

En conclusion, la baisse du PNL du secteur en 2018, et au 1er semestre 2019, et la baisse des bénéfices au terme de l'exercice écoulé, confirmé par la chute des bénéfices sociaux au premier semestre 2019 est liée aussi bien à des facteurs conjoncturels que structurels (d'ordre réglementaires).

Les facteurs conjoncturels sont liés à la hausse rapide et successive des taux d'intérêts, à l'assèchement de la liquidité et à l'effet d'éviction exercé par les banques. La concurrence entre les acteurs du leasing, n'est pas en soi un facteur handicapant, au contraire elle est source du juste prix et favorise les processus d'innovation et améliore la productivité.

Les facteurs structurels, qui ont mis le secteur en difficulté, sont attribués au cadre réglementaire qui favorise les banques au détriment des sociétés de leasing. Sur les 81 Mrd de dinars de crédits des banques à l'économie au 31 mai 2019, 13 Mrd de dinars, soit 16% provient des emprunts des banques auprès de la BCT.

Les crédits à l'économie du secteur de leasing s'élèvent à seulement 4,4 Mrd de dinars, soit 33% des crédits des banques provenant uniquement des ressources de la BCT.

Accordé la possibilité de se refinancer directement auprès de la BCT au même titre que les banques, apportera une bouffé d'oxygène non seulement au secteur de leasing mais à toutes une série de branches d'activités connexes. En situation de carence totale de ressources, le refinancement constitue l'alternative de dernier ressort qui permet d'éviter une crise majeure du secteur. A défaut, les crédits des banques accordées aux compagnies de leasing devront être considérés comme actif (collatéral) éligible au refinancement des banques auprès de la BCT au même titre que les créances sur les entreprises non financières, ce qui donnera accès indirect au refinancement de la BCT.

Publié le 13/11/19 14:06

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