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SMART Tunisie, histoire d'une transmission intergénérationnelle réussie

ISIN : TNQPQXRODTH8 - Ticker : SMART
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Du haut de ses 36 ans d'histoire et ses 290 millions de dinars de chiffre d'affaires en 2020, la société SMART Tunisie, spécialisée dans la distribution de produits high-tech, voit son rôle de plus en plus renforcé dans le pays, en dépit d'un marché concurrentiel. Leader du marché de la distribution de matériel et de services informatiques, le groupe est né en réponse au changement de la législation concernant le commerce de détail et la vente de gros. Prologic devient ainsi l'entité fondatrice de SMART.

MM. Abdelwaheb Essafi, Taoufik Ben Khemis et Mahmoud Bouden, respectivement DG, Président du Conseil et DGA de SMART Tunisie

 

Les trois figures de proue du groupe : Abdelwaheb Essafi, Mahmoud Bouden et Taoufik Ben Khemis, se réjouissent d'un nouveau pas entrepris par la société : une introduction à la Bourse de Tunis. A travers cette interview croisée, la rédaction d'ilBoursa a saisi l'occasion de découvrir ou de redécouvrir une enseigne qui, au fil des années, a introduit sur le marché tunisien des nouveautés technologiques. Deux des trois actionnaires de SMART, MM. Abdelwaheb Essafi et Mahmoud Bouden nous racontent l'histoire de la solidité du groupe.

L'innovation et la combativité chevillées au corps

Les deux fondateurs de SMART Tunisie ont fait leurs initiales dans de grandes multinationales et se sont ralliés après avoir travaillé ensemble pendant plus d'une décennie. " Abdelwaheb Essafi était chef de projet DSI des Établissements Montenay ainsi que mon client puisque j'étais ingénieur commercial chez IBM. J'ai créé Prologic Tunisie, qui commercialisait, entre autres des Softwares. L'idée d'expansion reposait sur l'obtention d'agrément de la part d'IBM pour être un de leurs distributeurs en Tunisie ", se rappelle Mahmoud Bouden.

Il a créé la société dans le contexte tendu que représente la fin des années 1980 en Tunisie. Il s'est donné comme tache d'expérimenter de nouvelles formes d'élan collectif. " Nous nous sommes connus dans un contexte de crise ", poursuit-il. " Aujourd'hui, il est commun d'utiliser ce mot pour qualifier la conjoncture actuelle, néanmoins, l'économie tunisienne était à la peine avant 1986. Il suffit d'imaginer qu'à cette époque, la Banque centrale avait annoncé deux jours d'importations seulement. Je considère qu'il s'agit d'un critère solide pour juger de la situation. Le Premier ministre de l'époque, feu Mohammed Mzali, avait déclaré qu'il fallait suspendre les importations ".

La situation semblait freiner les ambitions des entrepreneurs de l'époque. Au lieu de renoncer à lancer leurs propres projets, Abdelwaheb Essafi, Mahmoud Bouden estimaient qu'il s'agissait du bon moment pour entreprendre. " Lors de cette crise, Abdelwaheb Essafi et moi nous sommes croisés un 1er janvier. Nous nous sommes associés et nous avons demandé à IBM son agrément de la distribution d'IBM PC. Lorsqu'un distributeur disposait de l'agrément d'IBM, cela signifiait qu'il possédait le nec plus ultra de l'informatique ".

Les deux protagonistes du groupe SMART leur ont fallu du cœur et de la détermination pour surmonter les défis uniques auxquels ils ont été confrontés. " Abdelwaheb Essafi s'est attelé à cet objectif et nous avons dû nous battre et trouver mille et une astuces pour obtenir cet agrément. Une fois en poche, c'était le démarrage de Smart Tunisie ", se réjouit Mahmoud Bouden. " Nous avons réussi à occuper une place de leader grâce à cet agrément, que Prologic a fini par avoir. Cette autorisation a également permis à l'entreprise de réaliser, en seulement un an, des résultats qui l'ont mis en tête du classement des sociétés installées depuis longtemps sur le marché. Ce que Abdelwaheb Essafi a réussi à faire, c'est d'associer à titre symbolique des hommes d'affaires tunisiens afin de prouver à IBM que nous sommes dignes de confiance et que nous disposons des garanties financières nécessaires ".

L'obtention de l'agrément constitue un virage de l'histoire de SMART ainsi qu'un exploit à tous points de vue. " Les activités de nos homologues étaient principalement fondées sur des commerçants alors que les nôtres se différenciaient par le Background technique de notre équipe. Taoufik Ben Khemis, Mahmoud Bouden ainsi que moi sommes spécialistes en réparation, programmation et analyse. En d'autres termes, nous sommes à l'aise avec nos produits, ce qui véhiculait une certaine assurance au client, qui avait plus confiance en nous ", se félicite Abdelwaheb Essafi.

En lançant Prologic, les acteurs du secteur s'attendaient à un succès retentissant mais ne s'imaginaient pas que l'entreprise serait un an après à la tête des ventes, scellant la confiance accordée par IBM. " Avant l'obtention de l'agrément, les différents intervenants dans l'octroi de l'agrément tenaient des discours antinomiques. IBM n'a pas regretté de nous avoir délivré l'agrément étant donné que nous avons pris la première place de distributeur agréé en Tunisie ", ajoute Abdelwaheb Essafi. En 1997, la loi disposait de la séparation entre les locaux de vente en gros et les locaux de vente en détail. De cette manière, SMART Group était né.

Prologic prend son envol et se dirige vers la réussite

Si Prologic a pu être un lauréat du secteur, ce n'est pas grâce à une certaine exclusivité avec IBM. En effet, en suivant le modèle de concurrence pure et parfaite, la multinationale IBM ne pouvait pas prioriser un seul distributeur. " Nous n'étions pas le représentant exclusif d'IBM. IBM évitait l'exclusivité puisque c'est une firme qui est très prudente. En outre, juridiquement parlant, elle préserve ses intérêts. Elle ne donne pas l'exclusivité à une seule entreprise. En effet, si la société se voit retirer son agrément et qu'elle fasse faillite, IBM devrait en assumer la responsabilité ", détaille Mahmoud Bouden.

Au vu de la succession de réussites, Prologic a étendu son offre de produit à 25 marques internationales allant des ordinateurs aux Softwares. Les succès de l'entreprise ne découlent pas d'un monopole puisque " c'est un marché libre où il y a un Market share, donc, l'exclusivité n'existe pas chez les constructeurs ", argumente Abdelwaheb Essafi. Par ailleurs, il révèle l'un des secrets de leurs réussites. " Ce qui nous a permis ce développement est sans doute notre respect de plusieurs critères comme la disponibilité, les connaissances techniques et l'acceptation de la concurrence ".

La part de marché de Smart Tunisie est de l'ordre de 40%. " La croissance du secteur des ordinateurs et accessoires en millions de dinars représente 306 millions de dinars en 2017, contre 350 millions en 2018 et 356 millions en 2019. En ce qui nous concerne, notre part s'est élevée à 104 millions de dinars en 2017, contre 120 millions en 2018 et 138 millions en 2019 ", indique Mahmoud Bouden.

Un écosystème de partenaires et clients toujours aussi dynamiques

SMART Tunisie place à égal niveau le bien-être de ses collaborateurs et la satisfaction de ses clients, avec une obsession : Miser sur la capital humain et respecter ses engagements. " Si les objectifs sont atteints et si les paiements sont honorés, il n'y a pas de raison à ce qu'un contrat soit rompu. Lorsque les fournisseurs ont à faire à une entreprise avec un historique de 35 années d'activité, aucun approvisionneur ne résilie le contrat. ".

SMART Tunisie devient ainsi une marque sectorielle attractive forte de ses valeurs. " Il subsiste des critères très importants à respecter, comme c'est le cas pour nous avec notre clientèle. Du côté du fournisseur, il est nécessaire de les payer à temps et même en avance si des ristournes nous sont accordées. Ainsi, il n'y a eu aucun problème avec les sociétés qui nous approvisionnent. D'ailleurs, 80% de nos paiements se font en anticipé, ce qui témoigne de la valeur que nous accordons à la réalisation de nos objectifs. Nous renforçons, ainsi, notre crédibilité, ce qui renforce notre coopération avec nos fournisseurs ", souligne Abdelwaheb Essafi.

Ce discours est appuyé par Mahmoud Bouden. " Abdelwaheb Essafi voit en la crédibilité du groupe un pilier des relations avec nos partenaires. La gestion du groupe réalisée est basée sur des valeurs. A part la crédibilité de notre société, il est nécessaire de garantir certains principes comme la fidélité, la loyauté, l'honnêteté et par-dessus tout le souci de faire de nos sociétés des entreprises citoyennes qui ont des relations avec l'administration, en étant régulières et transparentes ".

SMART Tunisie rompt avec la tendance nationale du manque de transparence, l'absence d'obligation de rendre compte et la faible primauté du droit. " Vous savez qu'en Tunisie, la transparence n'est pas la vertu numéro une des entreprises. En ce qui concerne le groupe SMART, toutes ses filiales honorent leur devoir de transparence et cela est sans doute le secret d'une réussite qui dure depuis 36 ans ", poursuit Mahmoud Bouden tout en rappelant que l'entreprise s'est construite sur des valeurs humaines considérées comme la base de la réussite puisque le véritable capital de SMART n'est pas le capital financier mais par-dessus tout le capital humain.

L'employé au cœur de l'introduction en Bourse de SMART

Les valeurs humaines prennent toute leur importance au vu d'une gestion basée sur le capital humain auquel nous accordons une importance toute particulière. Pour notre IPO, nous avons veillé à accorder une place importante au personnel en décidant de céder une partie de nos actions au personnel. Cette cession porte sur 75.000 actions avec une décote de 50% par rapport au prix de l'action ", déclare Mahmoud Bouden.

Pour Abdelwaheb Essafi, le personnel de SMART Group est indépendant étant donné que chacun représente une marque. " Il leur incombe de fixer les prix et sont en compétition, ce qui signifie qu'il n'y a aucun échange d'information ". Cette exemplarité fait partie du Business model sur lequel Smart Tunisie a construit son activité d'importateur. " Le fait d'avoir plusieurs marques à gérer n'est pas facile. Il faut trouver un modèle d'affaires qui marche et Smart a eu le bonheur d'en trouver un qui fonctionne à merveille et qui continue à susciter l'admiration des fournisseurs ", ajoute Mahmoud Bouden.

SMART Tunisie partira-t-elle à l'assaut du marché africain ?

" La question de l'implantation dans d'autres pays, notamment africains, est une question lancinante et qui se pose régulièrement. Nous avons sondé le marché africain et nous avons envoyé, il y a quelques années, toute une équipe en Côte d'Ivoire pour prospecter le marché ", déclare Mahmoud Bouden avant d'insister que l'opération a été reconduite une deuxième fois, il y a de ça quelques mois, en Côte d'Ivoire mais également en Lybie.

Néanmoins, la priorité réside en l'activité locale. " Le groupe SMART est plus centré sur le développement de ses activités en Tunisie. Notre stratégie a été basée sur la réussite de l'activité locale d'abord même si je sais qu'il existe d'autres entreprises dans le secteur qui ont une stratégie opposée à la nôtre ". Mahmoud Bouden n'en a cure de la tendance d'expansion de ses concurrents puisque leur vision est d'abord tunisienne " sans pour autant fermer la porte à un développement en Afrique ".

Il est persuadé que Smart Tunisie se développera dans d'autres pays du continent africain, notamment en exportant les services plutôt qu'en commercialisant du matériel informatique. A cela s'ajoute la nécessité d'avoir les compétences et l'infrastructure requises. Mahmoud Bouden est sûr de lui. " Nous croyons en nos équipes étant donné qu'une pépinière d'ingénieurs est sans cesse formée à Prologic ". 

L'introduction en Bourse est un des socles de la nouvelle stratégie de croissance

Un plan d'investissement d'une valeur de 17 millions de dinars s'étendra sur la période 2021-2025. Le groupe SMART mènera une extension de son siège situé à La Charguia. " Nous venons d'acheter un terrain mitoyen de notre siège d'une superficie de 5.000 mètres carrés. La nouvelle construction qui y sera érigée sera de trois étages, en sus d'une extension du dépôt. Nous avons également acquis un terrain à Bouargoub afin de bâtir une usine pour laquelle seront consacrés 8 millions de dinars. Une autre enveloppe d'investissement d'un montant de 3,8 millions de dinars sera orientée vers la maintenance d'ici 2025 ", détaille Mahmoud Bouden.

En ce qui concerne les 10 millions de dinars issus du Cashing, ils financeront une partie de ce budget d'investissement à travers l'extension de capital attendu, poursuit-il.

Ce que SMART a à offrir à ses nouveaux actionnaires

L'introduction en Bourse de Smart est antinomique avec l'habitude des trois actionnaires. " Il n'est pas dans nos habitudes de plébisciter le groupe Smart. Notre communication visait auparavant à faire connaître nos produits aux revendeurs avec lesquels nous travaillons et qui se chiffrent entre 2 et 3 mille clients. Il est n'est donc pas indispensable de faire de la publicité pour le groupe ", précise Mahmoud Bouden. " En revanche, les petits actionnaires forment le grand public, même si je préfère utiliser le terme d'épargnants ".

La stratégie de communication se transforme donc avec l'introduction en Bourse de SMART Tunisie. Il devient indispensable de s'adresser aux nouveaux actionnaires. Désormais, il faut faire de la publicité institutionnelle et faire parler du groupe Smart tout en donnant à l'épargnant les raisons pour lesquelles il investira son épargne. " SMART Group est une société qui dure depuis 36 ans, dont la stratégie vise la pérennité. Il est très important qu'il y ait une succession de générations à la tête de l'entreprise, qui doit évoluer dans le temps. Il faut que la société évolue avec son époque tout en restant fidèle à ses valeurs humaines qui sous-tendent sa politique. Il s'agit du bien le plus précieux et qu'il faut conserver de génération en génération. De surcroît, nous voulons transmettre aux prochaines générations ces valeurs et leur demander de faire de même pour les générations qui suivront ", détaille Mahmoud Bouden.

Il leur tient à cœur de présenter SMART Group comme étant une entreprise qui va durer et qui est fondée sur la continuité. " Il n'est pas question d'un feu de paille qui disparaîtra rapidement ", illustre Mahmoud Bouden. En ce qui concerne la rémunération des actionnaires, Mahmoud Bouden souligne que " derechef, nous avons un respect pour l'actionnaire qui investit son argent. Ainsi, 70% des bénéfices seront distribués. Il sied de les porter à un haut niveau par respect pour l'actionnaire qui attend le versement de ses dividendes pendant toute une année. Le groupe envisage de réaliser 18 millions de dinars de bénéfices pour 2021 ".

Propos recueillis par Omar El Oudi

Publié le 13/12/21 13:58

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