ilboursa arabic version ilboursa

INNOROV : Naviguer vers un avenir durable de l'aquaculture à travers l'innovation technologique

ISIN : TN0009050014 - Ticker : PX1
La bourse de Tunis Ouvre dans 60h26min

L'aquaculture, pilier vital de la sécurité alimentaire mondiale, est confrontée à des défis complexes à mesure que la demande croît et les ressources marines se raréfient. Dans cette ère de changements rapides, INNOROV, une startup émergente, s'est engagée à transformer l'industrie de l'aquaculture grâce à une approche novatrice et à des solutions technologiques avant-gardistes.

 

Aziz BOUFAIED, étudiant en informatique et l'un des cofondateurs d'INNOROV, nous expliquera dans cette interview comment sa jeune startup se positionne au cœur de l'évolution de l'industrie aquacole et comment l'équipe a relevé les défis lors de la création de solutions technologiques spécifiquement adaptées au marché africain.

 

Quelle a été l'inspiration derrière la création d'INNOROV ?

Avant même de devenir une startup et de passer par les phases de corporation, de pré-labellisation et de labellisation, l'idée a émergé lors d'une compétition à laquelle j'ai participé avec les autres cofondateurs d'INNOROV. Cette compétition, appelée la Mate ROV Competition, nous a conduits à être les premiers en Tunisie puis en Égypte, et finalement à participer à l'échelle internationale en Amérique.

Le thème de la compétition portait sur les technologies subaquatiques en général où nous devions concevoir des robots sous-marins et des solutions technologiques adaptées pour des tests en immersion.

Après notre retour de cette compétition en 2019, alors que nous étions encore lycéens, nous avons commencé nos études à la faculté. Nous nous sommes demandé pourquoi ne pas appliquer les connaissances que nous avons acquises, en utilisant les contacts que nous avons établis et les personnes que nous avons rencontrées, parmi lesquelles figuraient d'autres startups et porteurs de projets. Nous avons ainsi décidé d'appliquer ces compétences en Tunisie, en ciblant spécifiquement le marché africain.

Au départ, j'avais dans ma famille plusieurs entrepreneurs actifs dans l'écosystème tunisien. J'ai trouvé en eux l'inspiration nécessaire pour créer INNOROV. J'ai discuté avec eux de l'idée, des problématiques et de notre plan de démarrage. Ils nous ont accompagnés et conseillés. Nous avons également participé au programme "Open Startup Tunisia for Students" et avons été classés deuxième au sein de cette cohorte en 2021.

Par la suite, nous avons intégré le programme "OSTX", suivi du programme de pré-incubation "OST", où nous avons figuré parmi les 4 finalistes. Pendant ce temps, nous avons élaboré notre solution et ciblé principalement le marché africain.

Nous avons gagné en visibilité au sein de l'écosystème tunisien et grâce à des événements de mise en réseau. Nous avons également créé un réseau de contacts grâce à nos conseillers. Parallèlement à notre participation à "OST", nous avons obtenu la subvention AIR, pour le financement de Proof-Of-Concept dans le cadre du programme FLYWHEEL mis en œuvre par Smart Capital et la CDC, financé par la Banque Mondiale et la GIZ, d'un montant de 30 millions de dinars, pour la phase de prototypage. Ainsi, officiellement, INNOROV a été fondée en août 2022 et labellisée en octobre 2022.

 

 

L'application que vous avez développée semble jouer un rôle crucial dans la collecte de données pour les pisciculteurs. Pouvez-vous nous expliquer en détail comment cette application fonctionne et quels sont les avantages concrets qu'elle apporte aux utilisateurs ?

Nous avons conçu une application web, une plateforme dédiée aux entreprises de l'aquaculture afin d'optimiser l'ensemble de leurs opérations liées à l'alimentation des poissons depuis la prise de décision jusqu'à la distribution en mer. En effet, notre plateforme joue un rôle décisif en assistant ces entreprises dans leurs choix concernant la quantité d'alimentation à acheter pour les poissons, ainsi que la répartition précise à effectuer dans chaque cage.

Un élément central de cette application : le modèle d'intelligence artificielle. Celui-ci s'appuie sur les paramètres de qualité de l'eau spécifiques à chaque cage, englobant les données collectées par notre matériel et leur traitement sur la plateforme. Ce modèle est conçu individuellement pour chaque entreprise et il propose des suggestions basées sur la qualité de l'eau mesurée par les capteurs, ainsi que sur les données historiques de la société.

Ces suggestions incluent des recommandations quant à la qualité de l'alimentation à distribuer dans chaque cage. L'exactitude de ces prévisions peut atteindre jusqu'à 76,2%. Actuellement, de nombreuses entreprises dans le domaine de l'aquaculture pratiquent une suralimentation excessive de près de 30%. Cette suralimentation engendre des problèmes environnementaux et économiques tant pour elles que pour les écosystèmes marins. Les poissons et la mer sont impactés de manière négative.

D'autant plus, le coût de l'alimentation des poissons a augmenté en raison de facteurs géopolitiques tels que les tensions entre la Russie et l'Ukraine. Cependant, cette suralimentation excessive n'améliore pas la croissance des poissons de manière significative et aboutit à un gaspillage.

En somme, notre application se révèle être un outil essentiel pour les entreprises de l'aquaculture en leur permettant d'optimiser leurs processus, de réduire les pertes économiques et environnementales et de garantir une croissance plus efficiente des poissons grâce à des recommandations précises basées sur l'intelligence artificielle.

 

Réduire les coûts d'alimentation représente un défi majeur pour les pisciculteurs. Pouvez-vous nous détailler comment votre solution de "smart feeder" parvient à réduire ces coûts de manière efficace et comment elle a été accueillie par la communauté des pisciculteurs ?

Notre solution vise en premier lieu les aquaculteurs, avec un accent particulier sur les grandes sociétés d'aquaculture en Tunisie. Parmi ces entreprises, seize sont actives dans l'alimentation des poissons en cages en mer, situées à une distance allant de 5 à 7 kilomètres du rivage. Elles emploient des aquaculteurs qui interviennent quotidiennement sur site pour prendre soin des poissons.

Bien que nous ne soyons pas des experts en aquaculture, nous avons cherché à établir le contact avec ces sociétés. Nous avons abordé la situation en tant qu'étudiants porteurs d'une solution reposant sur des technologies révolutionnaires. Notre démarche a été bien accueillie car, en Tunisie, les solutions ciblant spécifiquement ce problème sont rares. Ces sociétés ont montré un grand intérêt envers notre proposition. Elles nous ont fourni des informations précieuses et nous avons eu l'opportunité de nous rendre sur place pour observer l'intégralité du processus d'alimentation des poissons.

 

 

Dans notre approche stratégique, nous avons choisi de développer notre solution de manière itérative, en collaboration étroite avec nos clients. Chaque étape de notre proposition est soumise à la validation de nos clients, afin de l'adapter au marché africain et aux spécificités des sociétés de la région. Cette démarche nous permet de progresser pas à pas avec nos clients, en garantissant que notre solution soit en parfaite adéquation avec leurs besoins et les réalités du marché africain.

Ainsi, notre "smart feeder" apporte une approche personnalisée pour réduire efficacement les coûts d'alimentation. Elle est accueillie favorablement par la communauté des pisciculteurs en raison de son caractère novateur et adaptatif, répondant aux besoins spécifiques des grandes sociétés d'aquaculture en Tunisie et en Afrique.

 

 

En tant qu'entrepreneur dans le secteur de l'agritech, quels sont les principaux défis que vous avez personnellement rencontrés lors de la création d'INNOROV, et quelles leçons en avez-vous tirées pour d'autres entrepreneurs qui souhaitent se lancer dans des projets similaires en Afrique ?

Notre parcours entrepreneurial a été marqué par plusieurs défis, notamment dès le début de notre aventure. L'entrepreneuriat exige une persévérance tenace et une endurance à long terme. En tant qu'étudiants, la création d'une entreprise nous a confrontés à de nombreux aspects méconnus tels que le cadre légal, l'établissement de comptes bancaires appropriés et les étapes de création. Nous avons dû solliciter l'aide d'autres startups et gestionnaires pour comprendre ces processus essentiels.

Un autre défi majeur était de trouver un équilibre entre nos études, la gestion de l'entreprise et le développement de notre projet. Le travail était intense, demandant souvent jusqu'à 17 heures de notre temps, sans compter les efforts consacrés à la réflexion stratégique, aux négociations avec les investisseurs, les clients et les accélérateurs, ainsi qu'à la gestion d'équipe. En tant que fondateurs novices, nous avons dû faire face à ces nombreux défis sans expérience préalable, en tentant d'optimiser les risques et les prises de décision.

Le financement a également été une préoccupation majeure. Nous avons investi personnellement dans la startup, en croyant fermement en notre idée et en notre projet. Ces investissements modestes de chaque membre de l'équipe ont constitué un apport initial précieux. Les compétitions auxquelles nous avons participé nous ont également apporté un soutien significatif, tout comme la récente subvention R de Smart Capital qui nous a permis de financer des phases de test. Parallèlement, nous sommes engagés dans des négociations avec des investisseurs nationaux et internationaux.

En tirant des enseignements de notre expérience, je conseillerais aux futurs entrepreneurs en Afrique de rester ouverts et de discuter de leurs idées avec d'autres acteurs du secteur. Ne craignez pas les échecs, car ils constituent de puissantes occasions d'apprentissage.

Le cycle de vie d'une startup est parsemé de défis, en particulier sur le marché africain, où les comportements des clients peuvent être un peu “complexes” en raison des méthodes traditionnelles. N'ayez pas peur d'expérimenter de nouvelles solutions. Prenez l'exemple d'Uber et de Bolt, où ce dernier a réussi à conquérir le marché africain grâce à des innovations adaptées aux comportements locaux telles que le paiement en espèces.

Propos recueillis par Jihen MKEHLI

Publié le 15/11/23 09:10

SOYEZ LE PREMIER A REAGIR A CET ARTICLE

Pour poster un commentaire, merci de vous identifier.

Ai6poOQzyqyf6QU968dj8sh5cSuGaUgz1a8j7Eo9kD8 False