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Fares Mabrouk : A Impact Partner, la priorité est donnée à l'employabilité

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"Il faut rendre hommage à l'entrepreneur, à l'entreprise et à l'homme d'affaires en Tunisie car ce sont eux les acteurs incontournables de la bataille contre le chômage » c'est ce qu'a déclaré Fares Mabrouk, directeur général de Impact Partner, premier et unique fonds d'investissement à impact social destiné aux entrepreneurs qui se mobilisent pour relever les défis sociétaux de la Tunisie post-révolution.

Interviewé à Cogite Coworking Space, Fares Mabrouk est revenu sur la nécessité d'élaborer un Livre blanc pour structurer le secteur porteur de l'entreprenariat social et favoriser la construction d'un écosystème qui lui soit favorable. Une initiative inspirante et porteuse d'espoir, vecteur de changements positifs dans notre société. Interview.

Membre du groupe Yunus Social Business Global Initiatives fondé en 2011 par le professeur Muhammad Yunus, Prix Nobel de la Paix en 2006, Impact Partner (anciennement connu sous le nom de Yunus Social Business Tunisia) s'est lancé le défi de l'employabilité avec pour objectif la création de 1.000 emplois en 2020 et plus du double en 2022.

Le fonds finance actuellement 12 projets innovants et son portefeuille ne cesse d'augmenter mensuellement. De la librairie en ligne, aux services de soins aux malades en passant par la production de miel et la réinsertion professionnelle via un programme de formation et du coaching par les arts martiaux, Impact Partner met en avant des profils d'entrepreneurs sociaux innovants. D'ici 2020, Impact Partner compte financer et concrétiser 50 projets dans les 24 gouvernorats de la Tunisie. Un point commun entre ces projets, ils se battent tous pour gagner la bataille de l'emploi.

Impact Partner, partenaire des PMEs créatrices d'emplois directs et indirects

"Depuis la révolution de 2011, l'Etat tunisien est le principal pourvoyeur d'emplois, mais avec un taux record d'agents dans la fonction publique, quasiment le double du nombre de fonctionnaires par habitant par rapport au Maroc, nous savons que les emplois de demain viendront des entreprises du secteur privé ; grandes entreprises, PMEs et TPEs. L'écosystème favorise-il ces acteurs ? Sommes-nous entrain de suffisamment valoriser, encourager et renforcer ces troupes qui au quotidien se battent pour l'emploi ?», a expliqué Fares Mabrouk.

 « Si on pose aujourd'hui la question de savoir quelle entreprise a créé le plus d'emplois en 2017, nous resterons sans réponse. En revanche, nous savons quelle entreprise a fait le plus de bénéfices et celle qui a enregistré la meilleure distribution de dividendes car ce sont ces modèles que nous favorisons dans l'économie traditionnelle », a mentionné M. Mabrouk. "Il nous faut changer de paradigme, mettre en avant, encourager et renforcer les meilleurs, non pas en terme de rentabilité, mais en terme de création d'emploi"

Il ajoutera que pour optimiser la création d'emploi, il faut faciliter la transition économique d'une TPE à une PME puis en une grande entreprise. "Plus nous favoriserons cette transformation, plus grandes seront nos chances de gagner cette bataille » a-t-il estimé.

L'entreprenariat social : une clé pour l'économie nationale et le progrès social

"Au niveau macro-économique, l'entreprenariat social est fondamental car il est vecteur de savoir, de progrès et de croissance. De plus, ce secteur contribue fortement à l'effort de l'Etat dans la diminution des inégalités" a-t-il déclaré. Pour régir et structurer ce secteur mixte alliant logique privée et publique, une politique claire doit être mise en place selon le directeur général d'Impact Partner.

Il s'agira en premier lieu de définir notre propre concept d'entreprenariat social en Tunisie car chaque pays a sa propre définition : ESS, Impact investing, Non profit organisations, Positive economy, shared values, …. Pour Fares Mabrouk "Aujourd'hui, il nous faut dessiner les contours de ce secteur et le structurer. Ce secteur intégrera les tentatives existantes telles que les groupements d'intérêts économiques, les associations, la société civile, qui jouent un rôle prépondérant. Il y a aussi les groupements de développement agricole (GDA) et les coopératives »

Outre une meilleure définition du concept, il a par ailleurs appelé à travailler davantage sur "l'ambition du secteur" en exigeant que sa structuration se fasse d'ici 5 ans avec une réelle transparence qui permettrait aux bailleurs locaux et internationaux d'investir dedans. "L'entreprenariat social en Tunisie, lorsqu'il aura réuni toutes ces conditions, pourrait constituer à moyen terme 5% du PIB tunisien et à plus long terme 10% », a avancé Farès Mabrouk.

L'élaboration d'un Livre blanc pour impulser l'entreprenariat social en Tunisie

"Il faut élaborer un Livre blanc pour assurer l'avenir de l'entreprenariat social en Tunisie", a proposé le directeur général de Impact Partner. Ce guide pratique permettrait de mettre en place une stratégie et une vision de ce secteur en Tunisie. Même si le cadre légal et réglementaire est essentiel, le plus important est "la réalisation concrète de projets en vue de répondre à des besoins", selon Fares Mabrouk, qui a tenu à préciser que Impact Partner est un acteur de l'entreprenariat social et non un organisateur.

"Nous ne sommes pas dans la structuration du secteur, nous travaillons dans le cadre de la loi existante et c'est dans ce cadre-là que nous essayons de faire avancer des entreprises que nous considérons comme clés pour le développement régional et la création d'emplois. C'est notre principale mission", a-t-il précisé.   

La Tunisie, une économie de rentes ?

L'idée que la Tunisie repose sur une économie de rentes où quelques grandes entreprises se partagent le gâteau a été abordée durant l'entretien. Selon Fares Mabrouk, cette idée est peut-être partiellement vraie. Pour en réchapper "il ne faut pas taper sur les grandes entreprises mais permettre aux PMEs de devenir à leur tour de grandes entreprises". Il a évoqué deux conditions indispensables pour permettre cette transformation.

La première consiste à ce que les PMEs et grandes entreprises doivent bénéficier des mêmes avantages économiques. Pour cela, une loi plus équitable doit intervenir. Comme l'a dénoncé Fares Mabrouk, "la législation tunisienne en vigueur établit des barrières empêchant la transition des PMEs en grandes entreprises".

A titre d'exemple, les fonds d'amorçage bénéficient aux Sociétés anonymes mais pas aux SARL alors que la plupart des PMEs sont des SARL ou encore les conditions de récupération des avances d'impôts ou de TVA. "Quand vous récupérez de la TVA et que vous êtes une grande entreprise, vous avez 100% d'avance à la première demande et 50% lorsque c'est une PME. Pourquoi ce déséquilibre qui nuit aux PMEs ? et ce ne sont là que quelques exemples d'un écosystème agressif vis-à-vis des PMEs et qui a mis en place une série de barrières empêchant les Petites et moyennes entreprises de devenir les GEs de demain », s'est interrogé Fares Mabrouk.

Impact Partner : Un mélange entre philanthropie et maximisation des profits

Quand on a posé la question à Fares Mabrouk de savoir quelle est la stratégie d'Impact Partner pour contrer l'aspect mercantile de l'entreprenariat en Tunisie, il répond qu'il est possible de maximiser ses profits et d'être philanthrope en même temps.

Par ailleurs, ce que recherche ce fonds d'investissement à impact c'est la professionnalisation de l'impact social. "Au lieu de créer une école dans un endroit, on va mettre cet effort à la disposition d'un projet pérenne qui permettrait de créer plusieurs écoles. C'est l'effet multiplicateur de l'entreprenariat social qui va permettre au projet de perdurer dans le temps" a-t-il expliqué.

Impact Partner : Comment ça marche ?

Concernant le processus, Fares Mabrouk a expliqué qu'Impact Partner a pris une année pour se concentrer sur l'accompagnement des entrepreneurs en les formant et en leur procurant une assistance technique. Durant cette période, les besoins spécifiques des entrepreneurs ont été passés au crible pour pouvoir leur proposer une offre adéquate répondant à leurs besoins.

Il en ressort que "Les entreprises qui ont un besoin financier de l'ordre de 50 mille à 200 mille dinars sont très mal desservies. Pour les entreprises dont les besoins s'élèvent à 20 mille dinars, il y a la microfinance et au-delà de 150 mille dinars, il y a les banques. Pour les projets dont les besoins financiers sont de l'ordre de 400 à 500 mille dinars, il y a une panoplie de fonds qui existent".

Fares Mabrouk a ajouté qu'entre 30, 40, 50 mille dinars et 150 mille dinars de besoins financiers, il y a un gap communément appelé "la vallée de la mort". C'est dans cette zone qu'Impact Partner intervient pour investir dans les entreprises à hauteur de 100 à 150 mille dinars "en capital, sans dettes, ni garanties ni encore apports personnels". Le déboursement des fonds s'effectue en 45 jours, une procédure rapide qui permet de ne pas accentuer le poids des besoins en fonds de roulement sur l'entreprise.

Les partenaires de confiance d'Impact Partner

Impact Partner est soutenu dans sa mission par la Banque Africaine de Développement (BAD) et par la Fondation Suisse Drosos Ils ont également bénéficié aussi des soutiens d'investisseurs sociaux allemands, du PNUD, de la Fondation Robert Bosch ainsi que de l'organisation Hollandaise Hivos Impact Investments. L'Arab Tunisian Bank (ATB) est également partenaire de ce fonds d'investissement social, une fierté pour Fares Mabrouk qui s'est exprimé à ce sujet avec optimisme. « Elle a considéré que le secteur de l'entreprenariat social était important dans son portefeuille. C'est la première banque à nous faire confiance et à investir dans des projets à impact social qui pourraient être pérennisés dans le temps ».

Propos recueillis par Khawla Hamed

Publié le 21/02/18 10:58

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