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Daniel PRUZIN, porte-parole de l'OMC : « Il est impératif de coopérer sur le commerce et non de s'en éloigner »

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Rencontré au siège de l'Organisation Mondiale du Commerce (OMC) à Genève, à l'occasion du séminaire de formation au profit des journalistes économiques francophones d'Afrique, Monsieur Daniel PRUZIN, porte-parole de l'OMC, a abordé certains sujets clés sur ce que sera la priorité de l'organisation dans les mois et même les années à venir. Voici sa déclaration.

 

Les intérêts des pays en développement et des pays les moins avancés sont au cœur des travaux de l'OMC - qu'il s'agisse des discussions qui ont lieu au sein de notre Comité du commerce et du développement, de l'assistance technique et de la formation organisées par notre Institut de formation et de coopération technique, ou du soutien apporté par nos programmes de partenariat tels que le Fonds pour l'élaboration des normes et le développement du commerce (STDF) et le Cadre intégré renforcé (CIR).

Le traitement spécial et différencié pour les pays en développement et les pays les moins avancés est un principe fondateur de l'OMC, et les discussions sur l'opportunité et la manière de renforcer ces dispositions feront probablement partie des discussions sur la réforme de l'OMC que les membres ont entamées lors de notre 12e Conférence ministérielle en juin.

Vous entendrez beaucoup parler de notre 12e Conférence ministérielle et de l'importance de cette réunion. Les membres de l'OMC ont obtenu un ensemble d'accords sans précédent lors de cette réunion, notamment sur les subventions à la pêche - le tout premier accord de l'OMC dont l'environnement est le cœur - les réponses de l'OMC à des urgences telles que l'insécurité alimentaire et la pandémie de COVID-19 - y compris une dérogation à certaines exigences concernant les licences obligatoires pour les vaccins COVID-19 - ainsi que la sécurité alimentaire et la réforme de l'OMC.

Les résultats ont démontré que l'OMC est, en fait, capable de répondre aux urgences de notre époque. Ils montrent au monde que les membres de l'OMC peuvent se réunir, par-delà les lignes de faille géopolitiques, pour s'attaquer aux problèmes du bien commun mondial, et pour renforcer et revigorer cette institution.

Si tous les membres se sont accordés sur l'importance vitale de l'agriculture pour leurs économies, les divergences sur certaines questions, notamment le stockage public à des fins de sécurité alimentaire, le soutien interne, le coton et l'accès aux marchés, ont empêché les membres de parvenir à un consensus sur une nouvelle feuille de route pour les travaux futurs.

L'agriculture a toujours été l'une des questions les plus difficiles du programme de négociation de l'OMC et continue de susciter de vives réactions de la part des nombreux membres pour lesquels cette question reste une priorité.

L'OMC n'a pas l'intention de se reposer sur ses lauriers. Nous avons beaucoup de travail à accomplir. D'ailleurs, les membres ont convenu lors de la CM12 de travailler au renforcement des disciplines convenues afin d'établir des restrictions sur les subventions qui contribuent à la surpêche et à la surcapacité des flottes de pêche. Ceci tout en tenant compte des besoins particuliers des pays en développement et des pays les moins avancés. Les membres doivent également travailler à la ratification de l'accord conclu en juin dernier. Les 2/3 des membres doivent l'accepter pour qu'il entre en vigueur.

Aussi, les membres ont convenu de la nécessité de réformer l'OMC et de la rendre apte à répondre aux besoins du commerce au 21e siècle.  Un élément important de cette réforme est la réforme du système de règlement des différends de l'OMC, qui a été entravé par l'absence de notre organe d'appel. Les membres ont convenu de mettre en place un système de règlement des différends pleinement fonctionnel d'ici 2024.

Comme je l'ai mentionné, l'agriculture demeure une question d'intérêt central pour beaucoup de nos membres. Ces derniers veulent progresser dans ce domaine, ils ne veulent pas attendre 20 ans de plus pour un accord. La Directrice générale, Ngozi Okonjo-Iweala, a dirigé une "retraite" de réflexion sur la question de l'agriculture le mois dernier dans le but d'explorer les moyens de sortir de l'impasse grâce à de nouveaux modes de pensée et de nouvelles approches.

Si, à première vue, cela peut sembler logique étant données les vulnérabilités de la chaîne d'approvisionnement désormais évidentes, le fait de ne commercer et d'investir qu'avec des amis et des alliés pourrait conduire à une fragmentation. Et une fragmentation plus large serait économiquement coûteuse pour toutes les économies.

Les économistes de l'OMC estiment que si l'économie mondiale se divisait en deux blocs autonomes, le PIB mondial à long terme diminuerait d'au moins 5 %, ce qui serait pire que les dommages causés par la crise financière de 2008-2009. Le FMI a approfondi ces travaux et sa modélisation montre que les perspectives de croissance des économies en développement dans ce scénario s'assombriraient, certaines subissant des pertes de bien-être à deux chiffres.

Comme l'a dit la Directrice générale, il y a aussi une réalité importante : de nombreux pays ne veulent pas avoir à choisir entre deux blocs. C'est un point de vue largement partagé par de nombreux pays pauvres et en développement.

Cela signifie également qu'il faut faire passer les pays d'Afrique, d'Asie et d'Amérique latine dotés d'un bon environnement macroéconomique des marges des réseaux de production mondiaux au courant dominant - nous pouvons rendre le commerce plus résilient tout en soutenant la croissance et la réduction de la pauvreté.  Comme l'a dit la Directrice générale, nous pouvons faire d'une pierre plusieurs coups.

Je conclurais en soulignant deux choses : premièrement, le système commercial multilatéral a apporté des gains importants aux populations du monde entier. Il a progressivement éliminé les barrières protectionnistes et donné naissance à une économie mondiale plus ouverte et plus prévisible.  Il a contribué à sortir plus d'un milliard de personnes de la pauvreté.  

Près de 40 % de la population mondiale vivait dans l'extrême pauvreté en 1980. En 2019, elle était inférieure à 10 %, avant que la pandémie de COVID-19, la guerre en Ukraine et l'augmentation des impacts climatiques ne commencent à faire dérailler ces progrès.

Deuxièmement, nous devons reconnaître que tout le monde n'a pas bénéficié de ces avancées, en particulier les pays en développement et les pays les moins avancés - leur part du commerce mondial reste faible. La part des pays en développement dans les exportations mondiales est passée de 36,8 % en 2010 à 39,7 % en 2013, mais elle a stagné depuis, n'augmentant que légèrement pour atteindre 40,1 % en 2021.  

Nous pouvons favoriser une plus grande inclusion en convenant de nouvelles règles pour le commerce numérique permettant à davantage de femmes et de micro, petites et moyennes entreprises d'accéder aux marchés internationaux. Nous pouvons mettre le commerce au service de la construction d'économies plus vertes et de la création de meilleurs emplois.

En bref, nous pouvons nous attaquer aux lacunes qui semblent affaiblir le système commercial multilatéral. La meilleure façon d'atteindre ces objectifs est de coopérer sur le commerce, et non de s'en éloigner.

Publié le 30/11/22 10:51

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