ilboursa arabic version ilboursa

Nabil Ghalleb : Zitouna Tamkeen se veut une banque d’affaires pour les populations défavorisées

ISIN : TN0009050014 - Ticker : PX1
La bourse de Tunis Ouvre dans 15h30min

Expert de renommée internationale en entrepreneuriat et développement durable, Dr Nabil Ghalleb a fait ses preuves dans différentes expériences riches et variées dans les quatre coins du monde. Il est aujourd'hui à la tête de l'unique institution de microfinance islamique en Tunisie, Zitouna Tamkeen. Auteur de plusieurs articles académiques sur la finance islamique mais aussi l'assurance, la gouvernance des entreprises et la gestion des risques, M. Ghalleb est persuadé que le marché de la Microfinance Islamique est toujours prometteur en Tunisie. Interview.

Dr Nabil Ghalleb fait la fierté de la Tunisie. Il figure désormais parmi les 50 leaders les plus influents au monde dans le domaine de l'économie islamique, selon le rapport 2018-2019 d'ISLAMICA 500, un classement indépendant international qui s'intéresse aux leaders des différents secteurs dans le monde. Titulaire d'un Master en ingénierie financière et d'un doctorat en finance obtenus tous les deux de HEC Montréal (Canada) avec distinction, M. Ghalleb a intégré la Banque Islamique de Développement (BID) en 2009 en tant que Senior Investment portfolio manager.

Au sein de la BID, M. Ghalleb a pratiqué le " Private Equity " et le " Project Finance ". A travers ces deux métiers, il a montré une grande maîtrise de l'expertise du concept de financement des projets qui requiert notamment une analyse approfondie de tous les paramètres financiers techniques, contractuels et juridiques inhérents aux projets de gros tickets.

Avant d'intégrer la BID, M. Ghalleb était professeur visiteur à l'International School of Management de Paris, professeur adjoint à l'Université de pétrole et de minéraux en Arabie Saoudite et instructeur universitaire à HEC Montréal. Entre avril 2014 et septembre 2015, il était conseiller exécutif Senior auprès du maire de la province de Médine en Arabie Saoudite. Il représente aussi la BID, depuis 2012, aux Conseils d'Administration de plusieurs banques islamiques.

Une mission au Soudan contribue à la reconversion de sa carrière

Tout a commencé en 2011 quand Dr Nabil Ghalleb s'est rendu au Soudan dans le cadre d'une mission ayant pour objectif la création d'une institution de microfinance qui s'appelle " IRADA ", filiale de Bank of Khartoum, 7ème plus grande banque en Afrique. " Cette mission m'a permis de constater à quel point la microfinance est capable de changer la vie des milliers de personnes vulnérables. Cette visite de travail a aussi fortement contribué à la reconversion de ma carrière ", explique-t-il.

A l'issue de cette mission, M. Ghalleb a songé à constituer en Tunisie ce qu'il voulait appeler " la banque populaire ". Il a, à cet effet, essayé l'obtention d'un agrément d'une nouvelle banque. Quelques mois plus tard, M. Ghalleb a proposé au gouvernement un nouveau projet portant sur la création d'un fonds de développement des régions. Toutefois, ses tentatives n'ont pas pu voir le jour.

Zitouna Tamkeen se veut une banque d'affaires pour les populations défavorisées

Bien que des activités de microfinance aient eu lieu en Tunisie depuis les années 1980, le pays n'avait pas de stratégie nationale pour ce segment jusqu'à l'adoption de la loi de 2011 sur la microfinance. Avec l'entrée de la BID dans le capital de la Banque Zitouna, un atelier avait été organisé à Tunis et en marge duquel un mémorandum a été signé entre les deux parties pour créer la première institution de microfinance islamique en Tunisie à savoir Zitouna Tamkeen.

Néanmoins, M. Ghalleb ne considère pas Zitouna Tamkeen comme étant une institution de microfinance mais plutôt comme une véritable banque d'affaires pour les populations défavorisées. " Nous voulons offrir tous les services qu'offre une banque d'affaires mais au profit des populations les plus démunies et non pas au profit des riches. Il n'y a aucune banque d'affaires qui sert les populations vulnérables au monde ", a-t-il affirmé.

Le business model de Zitouna Tamkeen est ainsi basé sur une approche innovante qui est celle de la capacitation économique ayant pour mission de connecter les couches vulnérables de la société tunisienne avec un secteur privé responsable dans une relation d'affaires équitable et juste. Et c'est pour cette raison que le tour de table de Zitouna Tamkeen est un mariage des acteurs économiques et des acteurs financiers de premier plan à savoir la BID, le groupe de la Banque Zitouna, les groupes Poulina et Délice Holding, la Caisse des Dépôts et Consignations (CDC) ainsi que le fonds marocain de microfinance JAIDA.

" Nous ne sommes pas là pour faire de la simple intermédiation financière mais plutôt pour être un vrai acteur économique, et c'est pour cette raison que nous avons misé sur une composition diversifiée de notre actionnariat réunissant autant d'acteurs économiques que d'acteurs financiers ; le but est de créer cet effet de synergie qui permettra le développement des chaines de valeurs conçues pour servir les couches les plus vulnérables, et garantir leur durabilité grâce à des lignes de financements fournie par des acteurs financiers engagés pour notre cause" précise-t-il.    

L'approche de Zitouna Tamkeen pourrait être particulièrement utile pour impliquer davantage de personnes dans des opportunités d'investissement autour des chaines de valeur en leur offrant un package de services intégrés incluant entres autres l'accès au financement. " Pour atteindre nos objectifs, nous avons mis en place une direction centrale de l'ingénierie d'affaires. A travers ses Investment Bankers, cette direction a pour but   de mener les études de marché sectoriels, détecter les différentes opportunités d'affaires susceptibles d'être traduites en busines models et les faire après suivre par les business plans adéquats ".

Selon lui, le modèle d'affaires de la capacitation économique nécessite obligatoirement de lever les six contraintes suivantes :

  • Trouver l'opportunité d'investissement approprié pour les jeunes selon les spécificités régionales,
  • Tisser les partenariats intelligents avec les secteurs public et privé, et la société civile,
  • Mettre en place de l'investissement support et de l'infrastructure de base en collaboration avec les partenaires,
  • Développer des programmes de renforcement de capacités des bénéficiaires,
  • Faciliter l'accès au marché à travers des contrats cadres à long terme avec les partenaires sourcés en amont
  • et enfin commercialiser d'une offre financière adaptée qui représentera la cerise sur le gâteau.

Se faisant l'approche de la capacitation économique contribue ainsi à l'inclusion économique des jeunes et représente un outil efficace et innovant de gestion des risques des microprojets.

Enfin, il faut constater qu'à travers la microfinance islamique, Zitouna Tamkeen offre un produit spécifique et unique en Tunisie qui contribue pleinement à d'inclusion financière des populations vulnérables de la société vu sa forte corrélation à l'économie réelle.

Une révision de la loi s'impose

Une révision en profondeur de la loi de 2011 sur la microfinance s'avère nécessaire. Elle contribuerait à favoriser le développement du secteur et faciliter l'accès à la gamme de services offerts par les institutions de microfinance. " L'Etat doit nous garantir des sources de refinancement à faible coût pour que les institutions de microfinance soient en mesure de financer des microprojets à un coût raisonnable. Loin de ça, nous sommes allés jusqu' à la revendication d'un fond de refinancement dédié au secteur de la microfinance. ", appelle encore M. Ghalleb.

En effet, pour établir une concurrence loyale entre les produits de microfinance islamiques et non islamiques, il est nécessaire de réformer le cadre législatif afin de prendre en compte les spécificités des produits financiers islamiques. " Le principal défi des IMFs est le refinancement. Les bailleurs de fonds possibles pour une institution de microfinance islamique sont encore moins nombreux. Nous devons donc se tourner vers les marchés internationaux pour trouver des lignes de financements, et dans ce cas-là on se trouve face à un autre problème majeur à savoir le risque de change ", fait savoir M. Ghalleb.

Une deuxième priorité qui a été évoquée par le PDG de Zitouna Tamkeen et qui n'a jamais existé en Tunisie pour diverses raisons, c'est la création d'un fonds de garantie national dédié au secteur de la microfinance outre un système fiscal favorable à ce dernier. " Un fonds de garantie représenterait une assurance supplémentaire pour les projets développés par les institutions de microfinance tandis que des avantages fiscaux devraient être accordés afin d'encourager les projets montés dans les zones les moins favorisées ", estime M. Ghalleb.

Enfin, le secteur de la microfinance en Tunisie est toujours vulnérable bien qu'il semble prometteur pour le pays où il existe une demande importante pour divers instruments financiers conventionnels et islamiques. D'une part, la majorité des institutions de microfinance de la place n'ont pas encore atteint le stade de la maturité et d'autre part le législateur manque de flexibilité nécessaire pour jouer le rôle de facilitateur afin de permettre aux institutions de microfinance de trouver les solutions à certaines difficultés dont la plus importante est l'assèchement de la liquidité qui pèse de plus en plus lourd sur l'ensemble des acteurs et surtout sur la clientèle de la microfinance.

Un modèle innovant faisant ses preuves à domicile et valorisée à l'échelle mondiale 

Il résulte de ce qui précède, que  le modèle de Zitouna Tamkeen qui mise autant sur le potentiel des jeunes entrepreneurs tunisiens et leurs capacités à développer leurs propres projets, que sur le montage des projets de capacitation économique a connu un succès incontestables.

Ce succès, a par conséquence été reconnu sur le marché international faisant de l'expertise de Zitouna Tamkeen une référence à côtoyer.   

Zitouna Tamkeen est aujourd'hui sollicitée par des banques et des organismes de renommées mondiales, travaillant dans le développement durable à l'échelle internationale tels que la BID, la BADEA, les Nations Unies, Expertise France, etc.

Récemment, Zitouna Tamkeen a commencé à exporter son expertise à l'échelle continental en collaboration avec des partenaires intéressés à la microfinance en général et à la capacitation économique en particulier.

Zitouna Tamkeen veut incontestablement jouer le rôle de l'ambassadeur du savoir-faire tunisien dans le monde de la microfinance internationale.

Propos recueillis par Ismail Ben Sassi et Omar El Oudi

Publié le 09/07/19 08:58

SOYEZ LE PREMIER A REAGIR A CET ARTICLE

Pour poster un commentaire, merci de vous identifier.

jRIN9ntm4y1-GucdSkfCgwaMCOzfU27QqC9LTwPg11Q False