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Nabil El Madani : « Banque Zitouna, en bonne voie pour réussir sa Stratégie 2020-2024 »

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Vecteur d'accompagnement du développement et de la promotion de la finance islamique en Tunisie, Banque Zitouna n'hésite pas à dynamiser son apport à l'économie tunisienne en faisant confiance aux pouvoirs publics et en investissant dans divers secteurs. La Banque a su se conférer des moyens spécifiques pour aller au-delà des réformes structurelles dictées par le fondamentalisme du marché tunisien.

Leader de la finance islamique sur le marché tunisien, Banque Zitouna se projette dans une expansion africaine, d'abord, et mondiale par la suite sur les prochaines années. Éléments de réponse avec son Directeur Général, Monsieur Nabil El Madani, en poste depuis septembre 2019. Interview.

En plus de dix années d'existence, Banque Zitouna a su se réinventer pour un succès national. Comment expliquez-vous votre omniprésence actuelle malgré les incertitudes d'une Tunisie postrévolutionnaire ?

Nous ne devons pas nous arrêter uniquement sur les réalisations de la banque sur la seule année 2020. Nous devons, tout d'abord, traiter de la stratégie de la Banque, qui a été bâtie sur une vision bien définie. Les chiffres de l'année dernière ne sont que le fruit de la stratégie de la banque qui a fêté son onzième anniversaire, le 28 mai 2021. Cela veut dire qu'elle est encore jeune par rapport à ses consœurs.

En dépit de son jeune âge, la banque est passée par des moments difficiles que les autres banques n'ont pas vécus. A peine lancée et à tout juste après que la banque ait ouvert ses portes à la clientèle, le 28 mai 2010, la révolution de 2011 a eu lieu, accompagnée de son lot de retombées en termes de gouvernance.

Ce moment peut être comparé à la traversée d'une zone de turbulences durant laquelle le commandant doit gérer les secousses pour revenir à une zone de confort et, par la suite, se préoccuper des passagers.

Heureusement que la banque a trouvé son point fort dans son capital humain, qui reste notre leitmotiv. Tout d'abord, l'institution a réussi sa stratégie de recrutement initiale. Comme vous le savez, en début d'activité, une banque se doit de puiser dans le vivier de la place financière. Sur les premiers cadres, elle a pu attirer les meilleurs profils de la place de Tunisie. La période trouble endurée par la banque peut être considérée comme courte.

Face à ces bouleversements, quelles ont été les étapes clés qui ont insufflé une bouffée d'air à la Banque ? 

Il y a eu l'établissement des organes de gouvernance de la banque. Le Conseil d'administration a repris du service, un Président-Directeur Général a été nommé, ainsi que la présence d'un nouvel investisseur à savoir la Banque Islamique de Développement (BID). L'institution multilatérale a acquis une participation dans le capital de Banque Zitouna, ce qui a rassuré les acteurs de la place financière. A cela s'ajoute l'arrivée d'investisseurs privés, puis en 2019, l'État a cédé ses parts dans le capital au groupe MAJDA Tunisia qui a gagné l'Appel d'Offres international lancé par Al Karama Holding. Le groupe détient aujourd'hui 100% du capital de la banque.

Quid des bonnes pratiques de Banque Zitouna pour le renforcement de son leadership 

Le point fort de Banque Zitouna est son capital humain qui a reçu les enseignements de la finance conventionnelle et qui s'est approprié, par la suite, les éruditions de la finance islamique. La stratégie initiale de la banque était de former l'ensemble des cadres de la Banque sur la finance islamique. La quasi-totalité de nos cadres ont bénéficié d'une formation pointue et certifiante en matière de finance islamique.

Le nouvel acquéreur a fortement cru au capital humain Tunisien, avec d'abord un Conseil d'Administration composé de hautes compétences tunisiennes connues sur la place financière de Tunis. Il s'agit d'une vision fort respectable partagée avec nos investisseurs et qui fait honneur aux cadres tunisiens. Cela témoigne de la corrélation positive entre l'environnement propice et les performances des Tunisiennes et des Tunisiens.

En effet, nous demeurons toujours dans le monde de la finance mais nous travaillons autrement. Banque Zitouna a enrichi l'offre sur la place tunisienne en induisant des avantages pour l'économie, les entreprises et les clients nationaux. Nous avons mis en œuvre une politique de communication qui a suscité l'engouement des citoyens et de leurs sentiments à travers notre slogan de campagne " ليطمئنّ قلبي ". Il n'était pas seulement question de palabres étant donné que le client a été tranquillisé par la qualité de notre accueil et de nos conseils objectifs.  Nous leur avons exposé nos avantages et nous leur avons laissé la liberté de choisir.

Le plus important est que nous avons tenu nos promesses et que notre clientèle s'est retrouvée dans nos offres. Il est question d'un des points forts de Banque Zitouna car une rupture persistait ailleurs entre la communication et le monde réel. A partir de ces réussites, nous avons pu poursuivre notre petit bonhomme de chemin vers d'autres sommets. Toujours est-il que d'autres circonstances ont démontré d'une manière palpable les avantages de la finance islamique.

La mise en place de solutions internes est également au cœur de notre métier. Le développement du réseau de la banque est primordial car nous sommes une Banque de proximité. Plusieurs personnes ouvrent le débat sur l'éventuel développement du réseau pour savoir si la Banque serait toujours physique ou si elle emprunterait la seule voie du digital. Je leur dis que nous nous situons dans les deux optiques. Aujourd'hui, nous avons Zitouna TAKAFUL, sur le marché de l'Assurance, Zitouna finance et Zitouna capital. De plus, nous lançons cette année notre propre établissement de paiement. Nous n'avons pas une vision classique de l'agence bancaire et nous voyons autrement le point de vente.

 

Comment la Banque a-t-elle accompagné sa clientèle lors des différentes phases d'évolution observées sur cette dernière décennie ?

Après la révolution, l'évolution des taux directeurs oscillait autour de 3%, soit un niveau très bas afin de stimuler l'investissement. Notre particularité en tant que banque islamique est que nous finançons à des taux fixes. La modalité de remboursement que nous proposons était alors inédite. Certaines personnes qui se sont adressées à Banque Zitouna pour demander un financement insistaient sur le fait qu'ils ont la possibilité de contracter des crédits à taux moindre auprès d'autres banques. Néanmoins, les taux inférieurs exercés par les autres institutions bancaires étaient à taux variables.

Par la suite, le TMM a grimpé pour atteindre un pic de 7,90%, soit 5 points de différence. Celui qui s'est financé à un taux variable s'est retrouvé avec des échéances qui ont presque doublé, alors que celui qui s'est financé auprès de Banque Zitouna s'est retrouvé avec la même échéance.

L'année dernière, notre encours de financements a atteint 3,8 milliards de dinars, dont 72% ont été alloués aux entreprises. Le reste est destiné aux particuliers, notamment pour l'achat de l'immobilier. Nous finançons l'économie tunisienne en étant présent dans l'ensemble des secteurs tels que l'industrie, les services et l'agriculture. Nous finançons, par exemple, les récoltes d'olives destinées à la production d'huile, en plus de celles des dattes. L'année dernière la phœniciculture a subi plusieurs revers dont une surproduction ainsi qu'un ralentissement au niveau des exportations. Nous avons dépanné la machine et nous l'avons fait fonctionner.

Nous avons ouvert nos parapluies pendant les moments difficiles. Nous avons même financé des entreprises publiques alors qu'il existe une aversion persistante à ces sociétés.

 

Comment ce travail colossal a-t-il été conduit dans ces circonstances inédites pour la Tunisie ?

La gestion est difficile, certes, mais le mérite revient à nos spécialistes en matière de finance islamique. Nous disposons d'un pôle risque qui assure le suivi des risques et la gestion Actif-Passif (ALM). Nous scrutons et discutons les différentes évolutions des agrégats économiques en Tunisie. Nous observons les tendances mais également les performances de l'économie tunisienne, en plus d'établir des projections.

Je tiens à noter que les dépôts de Banque Zitouna sont constitués à hauteur de 52% de l'épargne. Il est question de la stabilité particulièrement du Taux de Rémunération de l'Épargne (TRE), excepté une augmentation de 100 points de base qui s'est faite en 2018. En effet, plus de la moitié de nos ressources sont rémunérées à des taux stables, par conséquent nous pouvons construire des prévisions pour fixer les taux de sortie.

A titre comparatif, la structure de nos dépôts est totalement différente de celle des autres banques. Cela explique les spécificités de la finance islamique. Nous mettons en avant le cœur de la finance en le décortiquant de manière scientifique pour répondre aux spécificités de la finance islamique. Il est question, ici, de notre point fort.

Nos clients ont trouvé en Banque Zitouna un réel partenaire. Le précepte de notre établissement est antinomique à la maxime de Mark Twain qui définit le banquier comme étant " quelqu'un qui vous prête son parapluie lorsque le soleil brille et le reprend dès qu'il pleut ". Par exemple, afin de communiquer sur l'augmentation du Taux Moyen du Marché Monétaire (TMM) à 7,90%, en 2019, nous avons choisi comme devise " Restez confiants, vous êtes avec nous …Thanna Medemek Maana". Il fallait rassurer nos clients sur nos taux qui demeurent inchangés.

 

Qu'en est-il de la législation tunisienne pour la réglementation de la finance islamique ?

Le problème de législation auquel sont confrontées les banques islamiques se rapporte au refinancement étant donné que nous n'avons pas droit au refinancement sur le marché. Depuis le départ, un débat théorique persistait : les dépôts font-ils les crédits ou, au contraire, les crédits font-ils les dépôts. Il est bien clair que pour la finance conventionnelle, ce sont les crédits qui font les dépôts et en fonction du gap de trésorerie, le refinancement sur les marchés est alors possible.

La finance islamique c'est totalement le contraire. Ce sont les dépôts qui font les financements. Et c'est pour ça que l'encours des dépôts dépasse celui des financements chez les banques islamiques. Partant du constat que les dépôts font les financements, cela peut représenter un handicap à notre développement mais nous ne sommes pas restés les bras croisés.

Avant la révolution de 2011, il n'y avait rien concernant la finance islamique, ni en matière de fiscalité, ni en matière de réglementation. Banque Zitouna était donc la locomotive qui pousse toujours au changement jusqu'à ce que la loi Bancaire N°2016-48 soit officiellement publiée, suivie de la nouvelle Circulaire de la BCT N°2019-08 traitant désormais des banques mais aussi des produits de la finance islamique, ce qui est un grand pas franchi.

 

Comment l'engagement du Groupe MAJDA représente-t-il un rouage de Banque Zitouna ?

Dès son arrivée, Le Groupe Majda Tunisia a cru dans le potentiel de Banque Zitouna. D'abord, il a accordé toute sa confiance dans les cadres tunisiens, qui ont assuré la réussite de cette institution, tandis que la nomination d'un Directeur Général parmi les hauts cadres de la Banque était un message trop fort pour l'ensemble du personnel. Ensuite, une nouvelle stratégie et un nouveau Business Plan ont été dressés pour la période 2020-2024 et ce, en étroite concertation et collaboration avec les hauts cadres de la Banque.

Il faut aussi reconnaitre que l'évolution de la règlementation nous a trop aidé mais pour résoudre le problème du refinancement, mais également, nous avons réussi à trouver des solutions par nos propres moyens sans toutefois oublier l'apport du nouveau propriétaire, le groupe MAJDA Tunisia qui a effectué avec succès deux augmentations de capital en 2019, la première de 55 millions de dinars et la deuxième de 90 millions, portant le capital de la banque à 265 millions de dinars et le total des fonds propres à 525 millions.

Sur un autre volet stratégique, le Groupe Majda Tunisia a une vision plus large de Banque Zitouna et s'est lancé à développer de nouveaux domaines de compétences avec l'ouverture de nouvelles filiales, en l'occurrence Zitouna Capital et Zitouna Finance, deux sociétés spécialisées respectivement dans le Capital investissement et la gestion des patrimoines.

Sans oublier un axe aussi important, à savoir l'accompagnement des entreprises tunisiennes dans leur expansion à l'international. Et c'est dans ce cadre que s'inscrit la signature tout récente d'une nouvelle relation Swift avec Ahli Bank Qatar visant à faciliter et promouvoir les opérations de commerce extérieur en faveur de notre clientèle. Toutes ces concrétisations témoignent de l'engagement du Groupe Majda Tunisia envers le développement de Banque Zitouna.

 

Où se situent les ambitions et les perspectives de la Banque ?

Dans notre stratégie, nous avons fixé des objectifs dont leur réalisation nous permettra de conserver notre position de leader de la finance islamique. Nous le sommes déjà en Tunisie et nous voulons l'être en Afrique. Notre développement à l'échelle continentale nous tient vraiment à cœur.

Notre enseigne doit être présente en dehors du territoire et notre vœu est d'avoir des représentations de la Banque en Algérie, par exemple. Notre potentielle présence en Libye est même primordiale. Avant que les visites officielles ne commencent, je m'y suis rendu et nous travaillons actuellement d'arrache-pied pour concrétiser notre présence dans ce pays voisin.

L'internationalisation de la Banque se fera soit par la création d'une banque ex nihilo, soit à travers le rachat d'une banque. Nous pouvons aussi passer par un bureau de représentation sur lequel nous nous baserons pour construire et consolider notre projet en dehors de la Tunisie.

Les performances de l'année 2020 réalisées montrent que la Banque est sur la bonne voie dans la concrétisation de sa nouvelle stratégie 20-24. Ainsi à moyen terme, nous ambitionnons d'être parmi les trois premières banques privées de la place tunisienne. Et il est primordial que nous maintenions notre rôle de locomotive ainsi que notre place de leader de la finance islamique en Tunisie.

Propos recueillis par Omar el Oudi

Publié le 24/06/21 10:49

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