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Dans les premiers échanges sur les marchés asiatiques de ce lundi, la livre turque s'est dépréciée de 2,5% à un niveau record par rapport au dollar. Désormais, le billet vert s'échange, contre 9,8 livres turques, marquant une deuxième semaine de trajectoire baissière prononcée et soutenue poussant la dévaluation à 10,4% sur la dernière quinzaine.
Le durcissement du ton du président turc, Recep Tayyip Erdogan, face à l'Occident a fait plonger la monnaie après avoir déclaré, samedi, persona non grata les ambassadeurs de dix pays, dont les États-Unis, la France, l'Allemagne et les Pays-Bas. Les émissaires sont menacés d'expulsion pour avoir demandé la libération de l'homme d'affaires et philanthrope, Osman Kavala, détenu depuis quatre ans sans avoir été condamné.
La méfiance marquée des marchés envers la conduite des affaires économiques par Ankara a poussé la livre à un plus bas historique de 9,75 dès dimanche. La monnaie a chuté de près de 24% depuis le début de l'année, matérialisant la pire performance sur les marchés émergents. La devise a déjà atteint des creux records la semaine dernière en raison de la réduction de 200 points de base du taux directeur de la Banque centrale de Turquie, conduite sous la pression du président turc.
Lorsque le taux de change de la livre se déprécie, le prix des produits turcs baisse pour les étrangers, ce qui soutient les exportations et donc la croissance du pays. Cependant, la Turquie est fortement dépendante des importations d'énergie et de matériaux agricoles, ce qui affectera la demande intérieure et stimulera l'inflation.
Dans un élan de défiance à l'encontre de l'Europe, Erdogan s'est fâché avec l'Allemagne, premier partenaire économique et où vivent plus de 2 millions de turcs, mais également avec les Pays-Bas, premier investisseur étranger en Turquie. Le chef d'État s'attaque aussi aux États-Unis, son plus grand allié au sein de l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord (OTAN) et premier fournisseur d'armes.
L'impasse diplomatique provoquée par le président Erdogan se fonde sur le refus de la libération de l'opposant Osman Kavala, bête noire du régime et soutien indéfectible des kurdes et des arméniens.
L'économie turque s'enfonce encore plus dans la crise économique. En sus de la forte chute de la valeur de la livre, le chômage explose dans le pays. Le bras de fer diplomatique a l'apparence d'une diversion afin de détourner l'attention de 90 millions de turcs, confrontés à une perte du pouvoir d'achat. Toujours est-il que la Turquie fait toujours miroiter le spectre d'une crise migratoire sur l'Europe.
En effet, 5 millions de réfugiés sont présents sur le territoire turc, dont plus de 3,5 millions de Syriens. Même si le pays a reçu près de 4,5 milliards d'euros depuis 2016 dans le cadre des " accords migrants ", le président Erdogan pourrait ouvrir les portes de l'Europe en réponse aux critiques des Occidentaux.
Mariem Ben Yahia
Publié le 25/10/21 12:14
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