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La BCT définit les opérations bancaires islamiques et fixe les modalités de leur exercice

ISIN : TN0009050014 - Ticker : PX1
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L'une des mesures phares de la loi bancaire numéro 2016-48 était l'instauration d'un cadre légal spécifique régissant l'exercice des opérations bancaires islamiques. C'est ainsi que l'article 4 de ladite loi a considéré les opérations bancaires islamiques comme des opérations bancaires au sens de la même loi.

L'article 11 de la loi n° 2016-48 a énuméré une liste non limitative des opérations bancaires islamiques et ajouté, au niveau de son dernier alinéa, que le Gouverneur de la BCT fixera ces opérations ainsi que les modalités et les conditions de leur exercice, par circulaire prise dans un délai maximum de deux mois à compte de l'entrée en vigueur de la loi.

Avec un retard de plus de deux années, la Circulaire relative à la Définition des opérations bancaires islamiques et fixation des modalités et conditions de leur exercice vient d'être publiée en date du 14 octobre 2019.

Rappelons que l'autre mesure phare de la nouvelle loi bancaire au sujet des opérations bancaires islamiques était la possibilité donnée aux banques et aux établissements financiers " conventionnels " de s'adonner aux opérations bancaires islamiques sur la base d'une autorisation de la Banque Centrale de Tunisie et ce conformément aux dispositions de l'article 22 de ladite loi.

L'alinéa 2 de l'article précise que la BCT fixera les conditions d'application de ce texte. Après plus de deux années de la promulgation de la loi bancaire, les conditions d'application de l'article 22 n'ont pas encore été fixées par la BCT. Les banques et établissements financiers " conventionnels " se trouvent ainsi privés de leur droit d'avoir des " fenêtres islamiques " conformément à la réglementation en vigueur.

1- Opérations bancaires islamiques

L'article 2 de la nouvelle circulaire de la BCT n° 2019-08 précise que les opérations bancaires islamiques prennent la forme :

  • Soit d'opérations de financement commercial ;
  • Soit d'opérations de financement participatif ;
  • Soit de dépôts d'investissement.

2- Opérations de financement commercial

Les opérations de financement commercial comprennent la Mourabaha, l'Ijara, l'Istisna'a et le Salam.

Le financement par "Mourabaha" a été défini par l'article 4 de la circulaire 2019-08 comme étant une opération par laquelle la banque ou l'établissement financier procède, suite à la demande du client donneur d'ordre, à l'acquisition de biens meubles ou immeubles ou de services auprès d'une tierce personne et à leur revente au donneur d'ordre à un prix équivalent à leur coût d'acquisition majoré d'une marge bénéficiaire déterminée d'avance, sous forme d'un montant ou d'un pourcentage fixe de la valeur initiale d'acquisition et payable selon un échéancier convenu.

La définition retenue par la circulaire 2019-08 diffère sensiblement de celle de l'article 12 de la loi bancaire n° 2016-48 qui limite l'objet du financement par Mourabha aux seuls biens meubles ou immeubles ou des marchandises déterminés. La circulaire 2019-08 a ajouté la possibilité pour les banques et établissements financiers d'acquérir des services auprès d'une tierce personne et de les revendre au donneur d'ordre à un prix équivalent à leur coût d'acquisition majoré d'une marge bénéficiaire déterminée d'avance et payable selon un échéancier convenu.

Les produits Mourabha sont destinés aux Professionnels ainsi qu'aux particuliers. L'article 5 de la circulaire insiste sur le fait le financement Mourabha est accordé aux Particuliers pour financer l'acquisition de services (financement des études, voyages…).

Pour l'Ijara, la circulaire la définie comme étant une opération de financement au profit des professionnels par laquelle la banque ou l'établissement financier procède à l'acquisition d'un actif et son appropriation puis sa location au profit du client en lui accordant l'option d'achat.

L'article 13 de la loi bancaire n° 2016-48 précise que les dispositions de la loi n° 94-89 relative au leasing s'appliquent sur les opérations de financement Ijara avec option d'acquisition.

Pour le financement par Istisna'a, la circulaire retient la même définition de la loi bancaire. Il s'agit d'une opération par laquelle la banque ou l'établissement financier procède au financement de la fabrication d'un bien meuble ou immeuble au profit de son client, en qualité de " Mostasni'i ", selon des spécifications déterminées.

A cet effet, la banque ou l'établissement financier :

- charge une tierce personne dite " Sani'i " de fabriquer l'actif sollicité, selon une opération de deuxième "Istisn'a", et ce, conformément aux spécifications définies par le client.

- livre l'actif au client en contrepartie d'un prix déterminé payable selon un échéancier convenu.

L'article 8 de la circulaire ajoute que la banque ou l'établissement financier peut s'engager en tant que " Sani'i " ou " Mostasni'i " et que le total des engagements de la banque ou de l'établissement financier au titre du deuxième "Istisn'a" ne peut en aucun cas être supérieur à celui fixé lors du premier "Istisn'a".

Enfin, la quatrième opération de financement commercial, le financement par Salam, est définie comme une opération par laquelle la banque ou l'établissement financier procède à un achat à terme à un prix en numéraire au comptant de biens meubles corporels déterminés par le client.

La banque ou l'établissement financier est tenu de vendre les biens meubles objet du "Salam" après leur réception, ou de mandater le client à cet effet, et ce, dans les délais fixés.

La banque ou l'établissement financier peut vendre les biens objet du "Salam" avant leur réception dans le cadre d'un deuxième "Salam" au profit d'une tierce personne.

3- Opérations de financement participatif

Les opérations de financement par Moucharka et de financement par la Moudharba n'ont pas été définies par la loi bancaire. Cette dernière s'est contentée de les énoncer parmi la liste des opérations bancaires islamiques de l'article 11.

Il s'agit donc d'opérations de financement de capitaux propres (prise de participation dans le capital).

Le financement par " Moucharaka " est défini par l'article 10 de la circulaire 2019-08 comme étant une opération par laquelle la banque ou l'établissement financier cofinance, avec son client, selon des proportions et une durée convenues, le coût de réalisation d'un projet, d'une activité ou d'opérations commerciales ponctuelles.

Le financement par " Mudharaba ", conformément aux dispositions de l'article 11 de la même circulaire, est une opération par laquelle la banque ou l'établissement financier fournit la totalité du capital au client en vue de financer un projet ou une activité. La contribution du client se limite à l'expertise et à la gestion.

4- Les dépôts d'investissement

Les articles 12 et suivants de la circulaire 2019-09 ont apportés plus de précisions à la définition des dépôts d'investissement de l'article 16 de la loi n° 2°16-48.

Sont considérés dépôts d'investissement, les montants logés par leurs titulaires par quelque moyen de paiement que ce soit, dans un compte d'investissement ouvert auprès d'une banque, et ce, en vue de les investir, en vertu d'un contrat de " Moudharaba " ou de " Wakala investissement ", en actifs pour une période déterminée, avec ou sans restriction.

La " Wakala investissement " est une opération par laquelle le client mandate la banque pour investir, en son nom et pour son compte, ses fonds dans des actifs, pendant une période déterminée, et ce, avec ou sans restrictions.

La " Mudharaba " est effectuée selon les deux modalités suivantes :

- la " Mudharaba restrictive " qui consiste, pour le client, à mandater la banque pour investir ses fonds dans des projets bien déterminés et selon des délais et des conditions convenues. Dans ce cas, le risque d'investissement est supporté par le client.

- la " Mudharaba non restrictive " qui consiste à accorder la liberté à la banque d'investir les fonds du client sans restriction aucune.

Le rendement des dépôts d'investissement est lié aux résultats de l'investissement. Les dépôts d'investissement supportent les frais directs liés aux opérations d'investissement ainsi que leur quote-part dans les dépenses communes.

Ces dépôts ne supportent pas les frais liés aux activités propres à la banque.

Les rendements et les risques de l'investissement sont répartis entre la banque et les titulaires des comptes d'investissement en fonction de la spécificité de chaque mode d'investissement.

La banque est tenue de communiquer, avant chaque opération d'investissement qu'elle effectue, son statut de " Mudharib " ou de " Wakil ", sa politique d'investissement et le taux des risques qui lui est associé.

Tous les six mois, la banque est tenue d'informer ses clients titulaires de comptes d'investissement de la nature des opérations d'investissement effectuées, de leur quote-part directes et indirectes ainsi que des modalités de répartition des profits et pertes.

5- Droits et obligations des banques et établissements financiers

L'article 16 de la circulaire précise que ces opérations de financement peuvent être assorties de garanties au profit des banques ou des établissements financiers, sous la forme d'hypothèques, de cautionnements ou d'autres garanties prévues par la législation en vigueur, et ce, dans la mesure où le recours à ces garanties, ne contredit pas les standards internationaux des opérations bancaires islamiques.

D'autre part, l'article 17 ajoute que la banque ou l'établissement financier peut, avant de conclure tout contrat de financement commercial, demander à son client le paiement d'un montant appelé "gage de sérieux " égal à un pourcentage déterminé de la valeur d'acquisition. Le "gage de sérieux " est destiné à garantir l'exécution du contrat et devrait être géré selon les conditions convenues entre la banque ou l'établissement financier et le client.

Pour les crédits aux particuliers, ce gage de sérieux n'est autre que l'autofinancement prévu par le dispositions des articles 35 bis et 35 ter de la circulaire de la BCT n° 87-47 relative aux modalités  d'octroi, de  contrôle  et  de  refinancement des crédits.

Enfin, les banques et les établissements financiers sont tenus, en ce qui concerne les contrats et les opérations bancaires islamiques, à se conformer aux standards internationaux adoptés en matière d'opérations bancaires islamiques et en particulier les normes de l'Organisation de Comptabilité et d'Audit des Institutions Financières Islamiques AAOIFI, et ce, dans la mesure où ces normes ne contredisent pas les dispositions légales et règlementaires en vigueur.

Ils sont soumis, dans le cadre de l'exercice des opérations bancaires islamiques à la règlementation en vigueur en matière d'octroi de financements, de leur contrôle ainsi que du suivi des risques y afférents (circulaires 87-47, 91-24…).

Sofiène WERIEMI

Expert-Comptable

Associé AdvAlliance Tunisie

Publié le 18/10/19 14:48

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