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Houssem Aoudi, co-fondateur de Cogite : « Le nouveau Coworking space sera gratuit »

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En Tunisie, les espaces de Coworking ont fleuri durant la dernière décennie en raison des besoins croissants des indépendants, des PME mais aussi des salariés à la recherche d'un bureau à proximité. Le pionnier national en la matière est l'espace de travail collaboratif Cogite, premier lieu de Coworking tunisien. Fondé deux ans après la révolution, soit en 2013, par Houssem Aoudi, Rym Baouendi et Zied Mhirsi, Cogite a connu plusieurs évolutions tout en veillant toujours à privilégier l'échange, l'humain et la convivialité.

Cogite a apporté à Tunis le concept de coworking qui  s'est étendu à certaines régions du pays comme Jendouba ou Djerba. Rapidement devenu un lieu de rencontre au coeur de l'écosystème entrepreneurial, cet espace a certainement eu un rôle de catalyseur de changement positif pour un entrepreneuriat tunisien en constante mutation. La rédaction d'ilBoursa s'est adressée à l'un de ses co-fondateurs, Houssem Aoudi, pour une rétrospective du concept de Coworking tunisien.

Il y a 15 ans, Houssem Aoudi était à la tête du lancement et de l'expansion de la partie digitale de Tunivision. Il a lancé le cycle de conférences TEDxCarthage avant de rejoindre TED. Il a ensuite cofondé Cogite pour créer par la suite, en 2013, la société de médias, Wasabi. Houssem Aoudi est également le fondateur de Afkar, créé en 2015.

Genèse de cogite

L'histoire de Cogite vient d'une idée toute simple. Rym Baouendi, Zied Mhirsi et moi utilisons toujours des espaces de Coworking pour travailler dans d'autres pays. J'ai rencontré Rym Baouendi en 2012, au TED Talent Search au cours duquel elle est intervenue en tant que fondatrice et directrice générale du cabinet de conseil en stratégie Medina Works, créé fin 2010. Elle m'a parlé de l'idée de faire un Coworking space. Le médecin spécialiste en santé publique, Zied Mhirisi, nous a rejoint pour cofonder Cogite.", explique Houssem Aoudi.

La transformation de Cogite en Success story a nécessité l'accomplissement de plusieurs phases. " Nous avons commencé en avril 2013. Notre siège social était domicilié à mon appartement à la Marsa. Ensuite, nous avons déménagé au mois de juin de la même année dans un espace de 80m² aux Berges du Lac. Il n'y avait même pas de chaises, mais nous commencions à voir les premières personnes s'installer dans l'espace. En 2015, nous avons déménagé dans une espace agréable au Lac avec plus de 1000m² couverts dédiés aux entrepreneurs", témoigne Houssem Aoudi.

Ces prémisses ont montré l'implication et la diversité des acteurs de l'écosystème entrepreneurial tunisien. " Les premiers à intégrer l'espace étaient l'équipe de l'initiative Munathara, suivit par Expensya, IlBoursa... ". Fort d'une dimension sociale, Cogite est comme un village dans la ville. Selon Houssem, le concept a ensuite été guidé par la motivation d'une communauté d'entrepreneurs. " Avec du recul, je pense que Fatène Ben Hamza, Kevin Coyne et Courtney Joline, qui composaient l'équipe exécutive fondatrice, ainsi que des mécènes comme Slah Kooli, Fares Mabrouk ou Leila Charfi, ont rendu le rêve possible et ont créé une effervescence autour de Cogite. Nous avons réussi à créer une dynamique entrepreneuriale et sociétale autour de ce projet. Cela a pu aider à la genèse de l'écosystème ".

Une réussite qui n'est pas fortuite

Cogite a vu des Startups devenir reconnues à l'échelle internationale et qui définissent, désormais, la réussite de l'écosystème entrepreneurial. " Nous avons donné le terreau pour que les gens plantent leurs Seeds à moindre coût. ". Les exemples de réussite fournis par Houssem Aoudi ne désemplissent pas. "La liste est longue, mais si j'avais vraiment à citer des entrepreneurs, ou Cogiters, dont je suis très fier, je dirais Yahya et Amine Bouhlel , fondateurs de la plateforme éducative panafricaine, GoMyCode, qu'ils ont fondée en 2017. Karim Jouini et Jihed Othmani de Expensya, devenue une multinationale, Mehemed Bougsea, Joscha Raue et Amel Abid de ThinkIt qui créent des opportunités aux jeunes ingénieurs tunisiens, Ismail Ben Sassi de IlBoursa, Fares Mabrouk et Leila Charfi de Impact Partner... ". 

La communauté a toujours été le cœur de Cogite. " Mis à part cela, la réussite peut être expliquée par un grand momentum. Les étoiles étaient alignées dans le sens où nous avons eu des bailleurs de fonds qui ont cru en nous, comme Hivos et Drosos. Nous avons eu un Board magnifique composé de conseillers reconnus à l'échelle nationale et internationale comme Slah Kooli, Badreddine Ouali, Fyras Mawazini, Hela Fadhel, Leila Charfi, Arthur Steiner, Fares Mabrouk et Khaled Ben Jilani (qui est pour moi la personne qui a donné le plus de temps à l'écosystème, tout organisme et toutes personnes confondus). Cogite, et moi, avons énormément de chance de les avoir autour de nous ".

La pose d'un jalon supplémentaire

En 2015, le Think & Action Tank tunisien Afkar a vu le jour. "Avec Fatène Ben Hamza, Slah Kooli, Fares Mabrouk et Kevin Coyne, nous avons commencé par l'initiative des " Conclaves d'Afkar ", qui créaient des livres blancs à destination des cercles de décideurs ". Les initiatives auxquelles Houssem Aoudi prend part sont celles engagées à rendre l'écosystème entrepreneurial plus inclusif. Par exemple, le programme de bourses " Afkar Fellow ", destiné à l'appui des projets provenant de toutes les régions de la Tunisie.

La confiance accordée à Afkar reflète une ambition concrète et nouvelle axée sur la réconciliation de la diaspora avec le pays. " L'idée d'Afkar Incubator, comme nous l'avions conçue avec mon co-fondateur Walid Hached, est d'intégrer des Startups à notre structure pour assainir l'écosystème et remplir le pipeline gratuitement et sans toucher aux apports financiers des actionnaires des entreprises. Nous avons levé de l'argent grâce à Wasabi, la fondation Drosos, l'Agence Française de Développement (AFD), la Caisse des Dépôts et Consignations (CDC) et la GIZ pour un projet à destination de la diaspora tunisienne ".

Moyens d'inclusion de la diaspora tunisienne dans le développement de l'écosystème

Parmi les différentes initiatives promises par des politiciens, des hommes d'affaires et des parlementaires, après 2011, peu ont été concrétisées. Ce qui explique, selon Houssem Aoudi, le manque de confiance de la diaspora envers les dirigeants du pays. " Offrir des garanties est nécessaire pour associer la communauté tunisienne à l'étranger au développement de l'écosystème ", a-t-il estimé.

Néanmoins, le retour saisonnier de la diaspora au pays est semé d'entraves. " En plus de cela, les premières interactions de la diaspora avec le pays se passent à leur retour. Elle est confrontée à la bureaucratie et à la corruption. La Tunisie a un problème de Branding au niveau de ses compétences. Il faut donc faire un grand travail de pédagogie pour restaurer la confiance. ".

Traiter avec la diaspora tunisienne est un des principaux fondements d'Afkar. " L'idée première est de relier les Tunisiens de Tunisie et ceux de la diaspora. L'opportunité de travailler avec la GIZ s'est présentée à nous et était disposée à fournir des fonds pour l'incubation. La première cohorte compte 38 projets ". Le programme d'incubation, Diaspora for Development, veut ainsi montrer qu'il y a de bons projets émanant de la diaspora, sans compter la motivation exprimée ".

Tous les projets d'Afkar vont vers l'impact social. " Nous visons aujourd'hui la diaspora africaine. Nous voulons essayer de changer la mentalité des deux côtés, c'est-à-dire, que les expatriés peuvent créer de la valeur dans leur pays de résidence et faire de même dans leur pays d'origine. De cette manière, une réduction des flux migratoires peut être engendrée en plus de l'amélioration de la situation des personnes ", précise le fondateur d'Afkar.

Rétrospective postrévolutionnaire

Houssem Aoudi dresse également un bilan d'une décennie postrévolutionnaire. " Nous avons, grâce à la révolution, le droit de pointer du doigt nos cancers systémiques et d'agir, individuellement ou d'une façon structurée, pour les combattre et construire un futur meilleur pour notre pays. ".

Selon lui, il n'y a pas de révolution qui réussit en dix ans. " L'installation d'une démocratie et de ses institutions peut prendre plusieurs générations. Il y aura beaucoup d'énergie dépensée et de la frustration générée, mais cette durée transitoire est minime à l'échelle d'un pays ", dit-il.

Quelle évolution pour Cogite ?

Le nouveau modèle de Cogite repose sur un retour à la communauté. " Mes associés se retirent pour s'investir dans leurs projets personnels. J'essaie de revenir à l'ADN de la mission de Cogite qui est la création d'une communauté de “Doers and Game Changers” en Tunisie, des gens qui font, des agents de changements et des créateurs d'impact. Quitte à le faire, autant le faire gratuitement ", précise-t-il.

Le nouveau Co-working space sera gratuit. Cependant, chacun des “Cogiters” devra offrir trois heures par semaine au service de la communauté. " Cela peut être sous la forme d'aide aux associations que nous parrainons, en aidant d'autres startups de l'écosystème ou même en donnant des workshops… l'essentiel c'est de consacrer un jour et demi de travail par mois aux travaux d'intérêt général", a-t-il conclu.

Propos recueillis par Myriam Ben Yahia

Publié le 29/01/21 10:25

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