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Désordre, mauvaise gestion, dette… Comment la « Gazelle » en est-elle arrivée là ?

ISIN : TN0001200401 - Ticker : TAIR
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Pour certains, la situation est devenue tellement insupportable qu'on a décidé carrément de boycotter la compagnie aérienne nationale. L'actuelle saison estivale marquée par un retour massif des Tunisiens Résidant à l'Etranger (TRE), démontre encore une fois l'incapacité de TUNISAIR à répondre aux besoins du pays en matière de transport aérien. Flotte de plus en plus pauvre, gestion aléatoire, dette insoutenable et services en deçà des attentes des passagers, TUNISAIR est au cœur de la tourmente. Comment sommes-nous arrivés là ? Cet article remonte à l'origine de l'actuelle crise.

Vols annulés, d'autres retardés indéfiniment, chaos à Tunis-Carthage, des passagers bloqués dans des aéroports étrangers… les formes de la crise sont multiples alors que la cause est unique : la mauvaise gestion.

Si le monde entier connaît actuellement une perturbation du trafic aérien, prendre l'avion s'annonce plus que problématique cet été. Le trafic aérien n'a pas retrouvé le niveau qu'il avait avant la pandémie et les retards dus à la saturation du contrôle aérien ont retrouvé les niveaux de 2019. La situation s'annonce difficile pour les vacanciers cet été. 

Sauf que pour la "Gazelle", l'enjeu est double. Répondre à une demande croissante provoquée notamment par le retour massif de la diaspora mais aussi par la reprise du secteur touristique, d'une part, et surmonter une situation financière assez critique, d'autre part.

Submergée par une demande qu'elle ne peut pas satisfaire, TUNISAIR est actuellement au cœur d'une crise marquée par une forte perturbation de ses vols, notamment en provenance et à destination de France. Mais pas que, pratiquement tous les vols de la compagnie subissent de plein fouet les conséquences d'une crise qui met, certainement, à mal son image, mais aussi celle du pays, déjà impactée par des années de mauvaise gestion et de mauvais service.

Rien que pour le weekend dernier, qui a coïncidé avec la fête de l'Aïd, plusieurs vols ont été annulés, d'autres retardés, des voyageurs se sont trouvés bloqués dans plusieurs aéroports. A l'origine de la crise, une flotte qui a " lâché " au pire moment. 

La moitié en panne !

Sur son site officiel, TUNISAIR présente une flotte de 29 appareils en exploitation, dont 22 Airbus et 7 Boeing. Sauf que la situation est tout autre. Selon une source bien informée, seulement 14 avions, dont un engin en location, sont en état d'exploitation par TUNISAIR, soit presque la moitié de la flotte. " Plusieurs engins sont en état de panne, la compagnie n'est pas en mesure d'acquérir les pièces de rechange nécessaires, elles sont hors de prix, notamment suite à la crise ukrainienne et l'envolée des prix à l'échelle internationale ", explique ce responsable.

Mais comment expliquer le fait que la moitié de la flotte soit clouée au sol ? La situation financière et la mauvaise gestion des affaires de la compagnie ont fait que TUNISAIR soit dépourvue de plusieurs engins. Alors que la compagnie avait annoncé depuis plusieurs années un plan de restructuration qui prévoit un licenciement massif des fonctionnaires pour alléger les charges et le renouvellement de la flotte en réparant les avions en panne et en achetant d'autres, la situation va de mal en pis.

Si la crise du coronavirus a bouleversé ce plan et a redistribué les cartes des décideurs de la compagnie, mais aussi de l'exécutif, TUNISAIR est sanctionnée par une gestion de dernière minute. Nous apprenons dans ce sens que ce n'est qu'à partir du mois d'avril que TUNISAIR a commencé ses préparations à la saison estivale et au retour de la diaspora. Le ministère du Transport et de la Logistique avait procédé durant cette période au versement de 31 millions de dinars à Tunisair Technics pour la remettre à flot.

Cette décision visant à débloquer la situation intervenait d'ailleurs suite à une pression exercée par les parties syndicales et par l'Union générale tunisienne du travail (UGTT). On prévoyait une acquisition rapide des pièces de rechange nécessaires, sauf que les commandes tardives n'ont pas été satisfaites, elles coïncidaient avec une envolée des prix, hors de portée de TUNISAIR.

La compagnie n'a donc pas pu réparer et remettre à flot sa flotte au bon moment, pourtant, elle continuait de confirmer les réservations devenues nombreuses avec la reprise du trafic aérien mondial.

Le directeur central du produit au niveau de TUNISAIR, Helmi Hussein, précise que la compagnie n'a pas accusé de retard au niveau de la réparation de sa flotte, mais selon ses dires, le problème est logistique par excellence. " Ce n'est même pas une question de moyens financiers, c'est une question de logistique car sur le marché international certaines pièces ne sont pas disponibles en stock et nous devons donc attendre ", a-t-il expliqué.

On évoque également la possibilité de louer des avions libyens afin d'assurer les vols programmés dans les prochains jours. Les avions d'une autre compagnie nationale privée devraient également entrer en service pour appuyer les efforts en vue de limiter cette crise.

Sauf que nous apprenons que les avions mis en location et pouvant entrer dans l'espace aérien européen manquent sur le marché international et ce jusqu'à la fin de la saison estivale. Un constat accentué par la forte reprise du trafic aérien mondial.

Une dette insoutenable

Cette crise ponctuelle que connaît actuellement TUNISAIR n'est que la partie immergée de l'iceberg. La compagnie est en effet sanctionnée par une mauvaise gestion chronique. Ni ses décideurs, ni l'exécutif ne considèrent le transporteur national comme un moyen servant l'image du pays.

TUNISAIR s'enfonce depuis plusieurs années dans une crise financière étouffante. Selon des données officielles, les dettes de la compagnie auprès des différentes banques s'élèvent à 900 millions de dinars tandis que celles auprès de l'office de l'aviation dépassent le milliard de dinars.

Cette situation de déficit budgétaire est accentuée surtout par une masse salariale incontrôlable. En effet, les charges liées au personnel compromettent fortement la compétitivité du transporteur aérien national qui compte un peu moins de 7.000 agents pour à peine 20 avions fonctionnels contre des normes internationales qui fixent un nombre maximal de 80 à 100 agents pour chaque avion.

Pour y faire face, la compagnie s'est lancée dans un plan de restructuration, qui jusqu'à présent avance à tout petit pas. Il s'agira avant tout d'assainir financièrement la compagnie à travers une augmentation du capital et une réévaluation du patrimoine de TUNISAIR avec l'éventualité de privatiser certains biens, non essentiels à l'exploitation.

Finalement, il s'agira de supprimer les destinations non rentables et se focaliser sur celles qui le sont afin d'assurer la pérennité de la compagnie et améliorer ses résultats. Il s'agira également de tenter de regagner la confiance des clients en modernisant la flotte et les services.

@ilBoursa.com

Publié le 11/07/22 11:21

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