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Coronavirus : L’économie tunisienne bascule dans l’inconnu

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La Tunisie voit nettement s'éloigner la perspective d'une reprise de la croissance de +2,7% de son économie sur l'année en cours, espérée par le gouvernement dans le rapport du budget de l'Etat pour l'année 2020. L'impact du choc Coronavirus sur l'activité économique nationale est difficile à cerner, mais la récession en 2020 est quasiment certaine.

Par Moez HADIDANE

Les effets de la détérioration de l'environnement internationale sur notre économie, structurellement malade, seront désastreux. On peut s'attendre à ce que cette récession soit profonde mais brève. Le rétablissement de l'économie tunisienne sera subordonné à des prises immédiates de décisions énergiques et courageuses et à des changements drastiques de la politique budgétaire et monétaire.

Sur la base d'un scénario de référence (exténuation de la pandémie dans le monde avant la fin du second trimestre 2020 et maîtrise de la contagion localement), la croissance économique de la Tunisie serait de -1,5% en 2020. Une estimation qui atteindrait -3% si les autorités monétaires n'adoptent pas, dans l'immédiat, une politique accommodante.

La BCT doit baisser son taux directeur de 200 voire 300 points de base avant la fin du premier trimestre 2020 dont les effets décalés devraient permettre à l'économie de se redresser fin 2020 et en 2021. La reprise graduelle de la croissance à partir de fin 2020 et en 2021 serait subordonnée à un changement drastique de la politique budgétaire du gouvernement qui favoriserait l'investissement productif, l'équité fiscale et la modernisation des infrastructures de base.

Economie tunisienne : le coronavirus, un mal de trop

L'économie tunisienne est largement ouverte sur l'extérieur et, de ce fait, elle est profondément dépendante de l'étranger aussi bien pour son approvisionnement de biens de consommation, d'équipements, de matières premières, ou pour couvrir ses besoins énergétiques, que pour vendre ses marchandises constituées principalement des produits agro-alimentaires, des biens de l'IME, des produits dérivés du phosphate et du Textile.

Les échanges de la Tunisie (Exportations + Importations) de marchandises (hors services) représentent 94% du PIB courant en 2019. Les huit premiers partenaires accaparent les deux tiers de nos échanges avec le monde. Les quatre premiers : France, Italie, Allemagne et Chine, détiennent 45,3% de nos échanges extérieurs en marchandises.

Les conséquences de l'épidémie du Coronavirus commencent déjà à se faire ressentir. Rien que sur les deux premiers mois de l'année 2020, les exportations en valeurs ont baissé de -1,5% et les importations de -2,5% par rapport aux deux premiers mois de 2019. Les importations en provenance de France ont chuté de -12,2%, d'Italie de -15,1%, d'Espagne de -15,4%, d'Allemagne de -6,9% et des Etats-Unis de -23,4%. Du côté des exportations, elles ont reculé à destination de la France de -18,2%, vers la l'Allemagne de -4,9% et vers le Royaume Unis de -18,6%.

Autres secteurs qui seront secoués par les retombées de l'épidémie Coronavirus, sont incontestablement le tourisme et les transports (hors redevance Gaz). Ces deux derniers ont assuré à la Tunisie 8,7 milliards de dinars de recettes en devises en 2019, soit 10,1% du total recettes courantes (Export + Services + revenus du travail + transferts) et 7,6% du PIB.

Les exportations de la Tunisie et le solde excédentaire des balances de services, des revenus des facteurs et des transferts, ne couvrent ensemble que 83,2% de la facture des importations de biens. Un gap de 10 milliards de dinars (Déficit courant) est comblé par l'endettement net extérieur et accessoirement par les IDE qui sont en perte de rythme en 2019 (-10,6%). En 2019, le solde de la balance financière été positif de 15,2 milliards de dinars en dépit d'un service de la dette extérieure de 9,26 milliards de dinars.

La Tunisie compte beaucoup sur l'année 2020 pour lever des fonds en devises. Rien que l'Etat, prévoit une levée de flux d'emprunts extérieurs de 8,85 milliards de dinars dont 3,44 milliards à mobiliser sur les marchés financiers internationaux. Une bonne partie des flux d'emprunts extérieurs sera allouée au service de la dette publique extérieure de 6,6 milliards de dinars (dont des tranches du crédit FMI 538 millions de dinars, une tranche du prêt marché financier international pour 400 millions d'euros et une tranche du prêt qatari pour 250 millions de dollars).

Compte tenu de l'impact direct et indirect de la pandémie sur les déficits jumeaux de la Tunisie, le besoin de financement en devises sera beaucoup plus élevé que prévu, dans un contexte où 70% de l'économie mondiale serait en récession d'autant plus que la plupart des pays ont mobilisé des moyens colossaux pour éradiquer la pandémie et soutenir la population et les entreprises les plus vulnérables.

Nos entreprises seront ainsi fortement exposées au ralentissement des échanges mondiaux dont la plupart vivent une situation financière difficile, caractérisée par l'élargissement du BFR, la pression accentuée sur la trésorerie et un endettement qui devient extrêmement cher.

Les autorités monétaires doivent changer de politique

Sur la base d'un scénario fondé sur l'hypothèse de contenir la pandémie dans le monde avant la fin du second trimestre 2020 et une contagion maîtrisée localement, avec une reprise graduelle tout au long du second semestre 2020, l'économie tunisienne devrait enregistrer une récession de -1,5% sur l'ensemble de l'année 2020 avec -0,8% au premier trimestre 2020, -3,7% au second trimestre, -2,6% au 3ème trimestre et +1,2% au 4ème trimestre 2020.

Ce scénario (de base) est subordonné à l'hypothèse de prises de décisions énergiques, tant sur le plan sanitaire, social qu'économique. Sur ce dernier volet, les autorités monétaires doivent changer de politique. Une baisse drastique du taux directeur de la BCT de 200 voire 300 points de base avant la fin du premier trimestre 2020 s'impose et dont les effets décalés devraient permettre à l'économie de se redresser fin 2020 et en 2021.

L'inflation ne tue pas, mais une éventuelle faillite des PME les plus fragiles et un appauvrissement continue des franges de la population les plus vulnérables, peuvent l'être.

Publié le 17/03/20 13:43

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