Ils étaient 12 mille à étudier dans les établissements universitaires tunisiens en 2010 mais leur nombre a diminué de moitié pour atteindre les 6.500 étudiants en 2018. Alors que la communauté des étudiants subsahariens en Tunisie contribue considérablement à l'économie nationale, il apparaît désormais que notre pays leur paraît de moins en moins attractif et cela pour de multiples raisons.
Mack Arthur Deongane Yopasho, Président de l'Association des Etudiants et Stagiaires Africains en Tunisie (AESAT), une association regroupant 25 pays d'Afrique Subsaharienne dont la mission est de favoriser l'intégration des étudiants et stagiaires africains en Tunisie, a avancé que ces étudiants étaient au nombre de 8.000 en 2015-2016 et qu'ils dépensaient en moyenne 5.670 dinars annuellement entre frais de scolarité, dépenses courantes et dépenses relatives à la délivrance du titre de séjour en Tunisie.
En 2018, ce nombre a notablement baissé pour atteindre les 6.500 étudiants et il apparaît que le Maroc est perçu comme une destination d'études beaucoup plus attractive vue que la durée de la carte de séjour minimum y est de 2 ans contre 9 mois en Tunisie. En effet, le Maroc accueille actuellement dans ses établissements d'enseignement supérieur environ 18.000 étudiants originaires d'Afrique subsaharienne dont près de 10.000 dans le public. Ils étaient à peine plus de 1.000 étudiants en 1994 et 16.000 en 2013.
Entre formalités administratives, problèmes financiers, marginalisation, racisme notoire… les étudiants subsahariens en Tunisie sont confrontés à une multitude d'expériences négatives qui se concentrent dans trois espaces : dans leur quartier d'habitations, dans la rue et à l'université. Ces étudiants subissent des comportements hostiles qui peuvent aller jusqu'au meurtre dans certains cas et c'est ce qui explique en grande partie la chute de leur nombre en Tunisie.
Lors de la tenue du "Tunisian African Empowerment Forum", le Président du TABC, Bassem Loukil, avait déjà tiré la sonnette d'alarme sur la chute du nombre de ces étudiants. Il avait rapporté qu'entre 2010 et fin 2016, le nombre des étudiants subsahariens en Tunisie est passé de 12.000 à 4.600 étudiants. Son constat était que "les étudiants étrangers ne veulent plus revenir en Tunisie ». Aujourd'hui, bien que ce chiffre ait augmenté pour atteindre les 6.500 étudiants, la chute et le manque à gagner demeurent conséquents.
Par ailleurs, lors d'une réception organisée en février dernier en l'honneur de la première promotion des médecins cardiologues subsahariens en Tunisie, le ministre des Affaires étrangères, Khemaies Jhinaoui, avait annoncé que "la Tunisie ambitionne d'accueillir 20.000 étudiants africains dans toutes les spécialités à l'horizon 2020 et cela en vue de faire de la Tunisie un hub régional en matière d'enseignement et de formation", l'objectif étant de s'inscrire dans une approche solide de coopération sud-sud.
Malheureusement, dans les récits de vie actuels des étudiants subsahariens, le séjour en Tunisie apparaît comme une rupture. D'après certains témoignages, notre pays est perçu comme culturellement à l'opposé de leurs attentes et sur place la plupart d'entre eux se disent confrontés à une situation de vie où la société les stigmatise.
Khawla Hamed
Publié le 26/12/18 14:55