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La réforme du climat des affaires en Tunisie au cœur du Forum de l'ASECTU

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Au cours des dernières années, la Tunisie a connu des transformations structurelles profondes. Ces changements sont principalement dus à l'évolution des régulations qui encadrent les activités économiques et sociales. La modernisation des lois a été conçue essentielle pour améliorer le climat des affaires, attirer les investissements étrangers et stimuler la croissance économique.

 

Les 6 et 7 juin à Hammamet s'est tenu le Forum de l'Association des Economistes Tunisiens (ASECTU) 2024, soutenu par le projet Savoirs éco, un programme d'appui aux structures productrices de savoir économique en Tunisie mis en œuvre par Expertise France et financé par l'Union européenne.

Lors de la première session plénière du Forum, intitulée “Réforme du climat des affaires : efficacité et contraintes”, deux types de transformations ont été discutés. D'une part, les changements relatifs aux incitations fiscales destinées aux investisseurs, et d'autre part, les évolutions concernant l'autonomisation des femmes et leurs perspectives de vie.

Quel a été l'impact de l'élimination des exonérations d'impôts directs dont profitaient les entreprises totalement exportatrices ? C'est en répondant à cette question que Massimiliano Calì, économiste à la Banque Mondiale (BM), a présenté les résultats de l'enquête “The Elusive Impact of Corporate Tax Incentives” réalisée par la BM.

“Le focus de notre recherche était sur l'évaluation d'un programme d'incitation, probablement le programme d'incitation aux entreprises le plus important que la Tunisie ait mis en place au cours des dernières décennies. Cette question est importante, bien au-delà de la Tunisie, car les incitations fiscales sont souvent citées comme l'un des principaux leviers pour attirer les investissements, en particulier les investissements étrangers. Ces incitations prennent différentes formes, telles que les incitations à l'investissement en capital, les réductions d'impôt sur l'électricité, et les incitations liées au coût du travail,” a-t-il souligné.

Il a ensuite ajouté : “En fait, l'OCDE a montré que 87% des économies en développement étudiées disposaient de régimes d'incitation fiscale, avec près de 69% ayant des taux d'impôt sur les bénéfices préférentiels et les deux tiers des économies ayant des crédits fiscaux. Ce système d'incitation fiscale est très coûteux du point de vue fiscal, représentant environ 1,4% du PIB mondial selon les récentes estimations. Dans le cas de la Tunisie, les dépenses fiscales représentaient environ 4,5% du PIB en 2022, dont 55% étaient attribuées aux entreprises. Cependant, nous manquons encore de preuves solides sur les effets économiques de ces incitations, à la fois au niveau mondial et en Tunisie.”

Dans le même contexte, il a insisté sur le rôle important des institutions fiscales en Tunisie pour les entreprises, non seulement en termes de fardeau fiscal actuel, mais aussi pour expliquer la grande différence entre les taux d'imposition sur le travail et sur le capital. Selon lui, cette différence, de 13 points en Tunisie, est la plus élevée dans les économies en développement, ce qui a des implications significatives sur les choix d'investissement des entreprises.

Et de préciser : “Pour étudier l'effet de la réforme sur la performance du secteur offshore par rapport au secteur onshore, nous utilisons des données administratives combinées à des données douanières, de sécurité sociale et fiscales. Après la réforme, nous observons une réduction de 20% du nombre d'entreprises, principalement due à une baisse des nouvelles entreprises offshore. Cependant, nous ne constatons aucun changement significatif dans l'emploi, la masse salariale, le chiffre d'affaires ou les exportations du secteur offshore par rapport au secteur onshore."

Les enjeux de l'investissement en Tunisie à l'ère de la transition économique

La Tunisie, en tant qu'économie en transition, est confrontée à une série de défis dans sa quête pour attirer les investissements et stimuler son développement. Parmi ces défis, certains sont plus apparents que d'autres.

Selon Namia Ayadi, présidente de la Tunisie Investment Authority (TIA), les obstacles majeurs à l'investissement ne résident pas tant dans la faiblesse des incitations que dans la complexité des procédures administratives et le retard dans l'octroi des autorisations ministérielles.

“En préparant notre rapport annuel pour l'année 2023, nous avons conduit, au niveau de la Tunisie Investment Authority, un surveil, une enquête, auprès d'à peu près 80 chefs d'entreprise. Aujourd'hui, les plus grands freins à l'investissement ne sont pas la faiblesse des incitations, mais plutôt les procédures administratives, en premier lieu, et la complexité des procédures administratives, et en deuxième lieu, le retard d'attribution des autorisations, de la part des différents ministères”, a-t-elle souligné lors de cette première plénière.

“On voit très bien qu'aujourd'hui, nous-mêmes, en tant qu'autorité d'investissement, à travers notre contact quotidien avec les investisseurs, on le ressent, et à travers les enquêtes, ça confirme qu'aujourd'hui, les problématiques ne sont pas les incitations, mais plutôt les problématiques d'infrastructures, de fonciers, de disponibilité de la main-d'oeuvre dans les zones où l'investisseur compte s'implanter, de la proximité vis-à-vis des pauvres, sur des régions enclavées”, atelleajouté.

En outre, elle a abordé la question de la relocalisation après la pandémie de Covid-19. Elle a souligné que la Tunisie n'a pas réellement bénéficié de cette tendance, contrairement aux pays de l'Est de l'Europe. Cette situation s'explique en partie par le soutien financier substantiel de l'Union européenne en faveur de ces pays, qui a permis d'offrir des incitations attractives pour attirer les investissements.

Cependant, Namia Ayadi se montre optimiste quant à l'avenir économique de la Tunisie, soulignant qu'une deuxième vague de relocalisation de l'Europe de l'Est vers d'autres destinations est en cours, offrant ainsi à la Tunisie une opportunité importante d'attirer des investissements directs étrangers.

Stratégies d'émancipation : Étude sur l'accès des Femmes au marché du travail en Tunisie

Depuis l'adoption du code du statut personnel en 1956, une législation prônant le principe de non-discrimination a été progressivement mise en place, bien qu'elle reste encore incomplète aujourd'hui. Les contraintes liées au capital humain des femmes ont été levées, comme en témoignent les statistiques relatives au système éducatif et universitaire. Cependant, les obstacles à l'emploi demeurent significatifs.

La participation des femmes sur le marché du travail est actuellement bien en deçà de leur potentiel, avec un taux d'activité inférieur à celui des hommes et un taux de chômage plus élevé. Bien que l'accès aux emplois salariés soit presque égalitaire, la participation des femmes à l'entrepreneuriat reste très faible.

Dans l'autre volet de la première plénière, une autre thématique a été abordée : "Est-il possible de promouvoir des activités génératrices de revenus pour les femmes en levant les contraintes de financement tout en offrant une formation en finance sensible au genre ? Et quel rôle joue l'association du conjoint à ces formations ?"

C'est dans ce contexte que Jules Gazeaud, chercheur au CNRS à l'Université Clermont-Auvergne, au sein du Centre de recherche sur le développement international (CERTI), a présenté les résultats d'une étude intitulée “With or Without Him? Experimental Evidence on Cash Grants and Gender-Sensitive Trainings in Tunisia” qui fournit des consultations financières, des transferts monétaires et des formations à des femmes dans la région de Jendouba.

Il a débuté en soulignant : “Il existe un écart énorme entre la participation des femmes et celle des hommes sur le marché du travail. Globalement, cet écart est de 26 points de pourcentage, mais en Tunisie, il est encore plus prononcé, atteignant 46 points de pourcentage. Même lorsque les femmes travaillent, elles sont souvent moins bien rémunérées que les hommes, même à compétence et statut égaux. Cette inégalité salariale a des conséquences majeures sur l'économie. On estime que le PIB mondial serait supérieur de 28 000 milliards de dollars s'il y avait une égalité de genre en termes d'accès au marché du travail”.

“Les normes sociales sont souvent moins favorables à l'entrepreneuriat féminin. Dans notre étude, nous avons mené un essai contrôlé randomisé (RCT) avec 2000 femmes en milieu rural. Le premier traitement consiste à offrir un transfert monétaire d'une valeur de 768 dollars, accompagné d'une formation conçue pour être sensible au genre”, a-t-il précisé.

Ensuite, Jules Gazeaud a abordé la deuxième phase de l'intervention. Celle-ci consistait à encourager les femmes à venir accompagnées de leurs conjoints. Cette approche visait à atténuer les contraintes normatives d'accès au marché du travail. Pour évaluer l'efficacité de ces mesures, un groupe de comparaison a été constitué afin de mesurer leur impact deux ans après leur mise en œuvre.

En pratique, 88 % des femmes ayant eu la possibilité d'inviter leur partenaire ont effectivement participé avec lui, indiquant ainsi un taux de participation élevé à cette intervention. L'objectif était d'impliquer les hommes dans ces discussions et peut-être de minimiser les réactions négatives potentielles liées à l'émancipation des femmes.

Jihen Mkehli

Publié le 08/06/24 19:17

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