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BH Bank : L'homme d'affaires Adel Ben Romdhane laisse une ardoise de 450 millions de dinars

ISIN : TN0001900604 - Ticker : BH

 

D'après le rapport général des commissaires aux comptes de BH Bank arrêté relatif aux états financiers arrêtés à fin décembre 2024, un groupe actif dans le secteur oléicole affiche un encours d'engagements auprès de la banque s'élevant à 450,7 millions de dinars à cette même date. Il s'agit du groupe de l'homme d'affaires Adel Ben Romdhane.

Bien que cette exposition soit classée parmi les actifs sains et ne comporte pas d'impayés au 31 décembre 2024, plusieurs événements postérieurs à la clôture de l'exercice ont mis en lumière des signaux de détérioration de la qualité de crédit de cette contrepartie et des couvertures y afférentes.

Ces événements, conjugués à des difficultés rencontrées par le groupe dans le recouvrement de ses propres créances commerciales, augmentent le risque de crédit supporté par la banque et justifient un reclassement de cette exposition en créance incertaine, conformément aux règles prudentielles en vigueur. À ce stade, l'impact d'un tel traitement, sur la situation financière et les ratios de la banque n'a pu être quantifié.

Rappelons qu'après l'arrestation de Abdelaziz Makhloufi, PDG du groupe CHO et figure emblématique du secteur oléicole, en novembre 2024, l'homme d'affaires Adel Ben Romdhane, figure incontournable de l'exportation tunisienne d'huile d'olive, a brusquement quitté le pays début 2025, laissant derrière lui un lourd passif financier et un secteur oléicole en détresse.

À la tête de la société Borges, spécialisée dans l'achat, le conditionnement et l'exportation d'huile d'olive, Adel Ben Romdhane avait bâti son modèle économique sur une stratégie agressive : sécuriser des contrats à l'international avant de s'approvisionner localement, principalement dans les régions de Sfax, Sidi Bouzid et Gafsa.

Toutefois, l'équilibre fragile de ce modèle a vacillé lorsque les autorités tunisiennes ont décidé d'intervenir sur le marché intérieur, fixant le prix de l'huile d'olive à 15 dinars le litre dans les grandes surfaces. Cette mesure, visant à contenir l'inflation et assurer l'approvisionnement national, a contraint l'homme d'affaires à rediriger une partie de sa production vers le marché local, compromettant ses engagements à l'international.

Déjà sous pression financière, et confronté à des restrictions à l'exportation ainsi qu'à l'entrée en vigueur de la nouvelle législation sur les chèques sans provision, Adel Ben Romdhane a fui le pays.

Une menace de crise systémique est-elle envisageable ?

Au-delà du cas particulier d'Adel Ben Romdhane, cette affaire met en lumière la vulnérabilité structurelle de l'écosystème économique tunisien, où des acteurs économiques majeurs, parfois peu encadrés et lourdement endettés, peuvent, en s'effondrant, déclencher des effets en chaîne aux conséquences dramatiques.

En l'absence de mécanismes efficaces de prévention et de gestion des risques, les dettes impayées accumulées par ces entreprises — notamment dans le secteur oléicole — risquent de se transformer en créances douteuses au sein des bilans bancaires, affaiblissant encore davantage un système financier déjà sous pression.

Ce contexte expose la Tunisie à un véritable risque de crise systémique. La faillite en cascade de nombreuses huileries, la perte d'emplois massifs dans les régions rurales, la contraction des investissements et la dégradation de la réputation du pays sur les marchés internationaux pourraient très rapidement dépasser le cadre sectoriel.

Sans intervention rapide, concertée et structurée des autorités publiques, des régulateurs et des institutions financières, cette crise pourrait évoluer en une instabilité financière d'ampleur nationale.

Face à cette menace, il devient impératif de renforcer le dispositif de gouvernance, de conformité et de contrôle au sein des établissements bancaires, en particulier les banques publiques, souvent exposées à des risques sectoriels mal encadrés. Une piste de réforme ambitieuse pourrait consister à regrouper les principales banques publiques au sein d'un seul établissement bancaire à vocation régionale et africaine.

Cette nouvelle entité, dotée d'une gouvernance moderne et des plus hauts standards internationaux en matière de conformité, de gestion des risques et de rentabilité, pourrait devenir un levier stratégique pour accompagner le développement économique tout en réduisant les fragilités systémiques.

Des levées de 212 millions de dinars en fonds propres

Rappelons que la BH Bank a déjà bénéficié d'un large programme de recapitalisation afin de se conformer aux exigences prudentielles de la BCT, soit un ratio de solvabilité au moins de 10% et un ratio Tier 1 de 7%.

En effet, après avoir finalisé un plan d'assainissement de son portefeuille depuis 2014, la Banque a concrétisé en 2015 un plan de recapitalisation réalisé en deux phases : émission d'un emprunt obligataire subordonné pour un montant de 90 millions de dinars au cours du mois d'avril 2015 et une augmentation de capital pour un montant de 80 millions de dinars pour le porter de 90 à 170 millions dont une partie en numéraire de 50 millions de dinars permettant une levée de 110 millions de dinars de fonds propres.

La banque a procédé fin 2017 à une deuxième augmentation de son capital social de 68 millions de dinars pour le porter à 238 millions. La moitié de cette augmentation de capital a été réalisée en numéraire permettant à la banque de lever 102 millions de dinars.

Omar El Oudi

 

Publié le 17/04/25 09:06

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