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Politique économique : Jusqu'où peuvent aller les divergences entre le

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Posté le 23/09/2023 03:10:44
Après on s'étonne de la situation économique du pays .
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Posté le 23/09/2023 03:10:44

Le ministre de l'Economie et de la Planification est le seul membre du gouvernement  –avec M. Kamel Guediche, ministre de la Jeunesse et des Sports- à n'avoir eu droit qu'à une seule audience avec le chef de l'Etat en deux ans. Faut-il voir dans cette restriction un signal précurseur annonçant la sortie de M. Samir Saïed du gouvernement, en raison de ses divergences avec le président à propos de la politique économique ?

 

 

Plus d'un mois et demi après la nomination de M. Ahmed Hachani au poste de chef de gouvernement, à la place de Mme Najla Bouden, le temps gouvernemental –et politique d'une façon générale- semble suspendu dans l'attente de la suite a priori logique : le remaniement, partiel ou total, de l'équipe gouvernementale.

Le suspens est donc total en ce qui concerne le maintien ou pas des actuels ministres, sauf peut être pour l'un d'entre eux, M. Samir Saïed, ministre de l'Economie et de la Planification, dont le sort semble, a priori, scellé.

L'ancien banquier qui a entamé sa première expérience gouvernementale avec le gouvernement Bouden, semble, logiquement, pouvoir difficilement garder son fauteuil ministériel en raison de ses divergences avec le président Kais Saïed au sujet de la politique économique et plus précisément de la manière de résoudre le casse-tête budgétaire auquel l'Etat est confronté et de relancer l'économie.

D'autant que le chef de l'Etat s'est déjà agacé plus d'une fois des écarts de certains ministres –sans les nommer- par rapport à la ligne qu'il préconise et en a limogé cinq depuis le 26 juillet 2021. Restées secrètes pendant très longtemps, les divergences entre les deux Saïed ont commencé à apparaître au grand jour le 2 décembre 2022. Ce jour, le président Saïed a en quelque sorte –et pour une raison qu'on ignorait encore alors- rappelle à l'ordre son ministre de l'Economie et de la Planification de manière subtile.

Lors d'une audience –dont la page facebook de la présidence de la république a diffusé un peu plus de 5 minutes-, il lui dit que "parmi les plus importants principes sur lesquels doivent se fonder l'économie et la planification la satisfaction des demandes du peuple de justice, de liberté et de dignité nationale".

Et pour mieux expliciter son propos, le chef de l'Etat attire l'attention du ministre Saïed que "l'Etat ce n'est pas seulement l'économie et la finance. Tout choix doit avoir une dimension sociale (…), surtout après que les caisses de l'Etat aient été vidées par ceux qui prétendent aujourd'hui vouloir le salut (du pays) ".

Malgré cela, on ne sait pas alors ce qui cloche entre lui et M. Samir Saïed. Toutefois, rétrospectivement on peut se demander si le recadrage présidentiel n'était pas en fait une réaction à l'accord préliminaire que la Tunisie avait conclu six semaines plus tôt –le 16 octobre 2022- avec le Fonds Monétaire Internationale (FMI) et par lequel la Tunisie s'engage, en contrepartie d'un prêt de 1,9 milliard de dollars, à mettre en œuvre des réformes économiques profondes, dont la levée des subventions des produits de base et la restructuration des entreprises publiques.

Cela se confirme le 6 avril 2023 quand le chef de l'Etat, qui avait jusqu'alors autorisé cette démarche –il n'avait en tout cas jamais manifesté la moindre réticence à ce sujet, du moins en public-, se déclare totalement opposé à un accord avec le FMI à de telles conditions. Et rejette les réformes préconisées comme étant des "diktats " du grand argentier du monde. Une position qu'il ne cesse de réitérer depuis.

A la différence de ses collègues concernés directement ou indirectement par ce dossier –qui évitent depuis de l'évoquer ou, du moins, de contredire le président, qui veut se passer d'un accord avec le FMI et prône une "solution tunisienne" au problème du déficit budgétaire, le ministre de l'Economie et de la Planification ne s'en prive pas. Samir Saïed campe sur position et continue à clamer haut et fort que la Tunisie ne peut pas éviter de passer par la case FMI.

Le 28 juillet 2023 à la Chambre des Députés Samir Saïed pousse le bouchon plus loin -trop loin- en invitant quiconque a une alternative au recours au FMI "à la présenter pour qu'on le discute et s'il est convainquant je serai le premier à changer d'avis, en tenant compte de la dimension sociale " à laquelle le président est fortement attaché.

Est-ce alors à cause de ces profondes divergences que le ministre de l'Economie et de la Planification –qui continue à assister aux réunions du Conseil des ministres- est, d'après les archives du site web de la présidence de la république, le seul membre du gouvernement  –avec M. Kamel Guediche, ministre de la Jeunesse et des Sports- à n'avoir eu droit qu'à une seule audience avec le chef de l'Etat en deux ans, qui remonte au 2 décembre 2022 ?

Surtout, faut-il voir dans cette restriction un signal précurseur annonçant la prochaine sortie de M. Samir Saïed du gouvernement ? En bonne logique oui, car le bras de fer entre le président et son ministre de l'Economie et de la Planification ne peut pas se poursuivre indéfiniment. Mais l'expérience des deux dernières années nous a enseigné que la "nouvelle république " a sa logique très particulière, souvent surprenante, qu'il n'est pas toujours facile de cerner.

Par Moncef MAHROUG


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