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Pourquoi l’Etat n’arrive-t-il pas à céder Carthage Cement ?

ISIN : TN0007400013 - Ticker : CC

Considérée comme la pépite du portefeuille des entreprises confisquées par l'Etat tunisien, la société Carthage Cement peine à trouver un repreneur. Après deux tentatives de cession annoncées en 2012 et 2018, un nouvel appel d'offres international a été dévoué à l'échec en 2021.

Malgré tous les espoirs portés par les actionnaires de la société pour la réussite de l'appel d'offres démarré en 2020 avec la participation de 5 investisseurs dont 3 cimentiers, la déception est bien là : l'unique offre financière déposée par un consortium burkinabé a été rejetée par la Commission nationale de gestion des avoirs et biens confisqués, présidée par la ministre des Finances.

Alors que le motif du refus de l'offre est que le prix proposé est en deçà de la valorisation du cimentier estimée par l'Etat tunisien, il semble que les raisons sont plus importantes qu'une simple déclinaison de prix qui aurait pu être formulée au plus tard dans le mois qui a suivi l'ouverture des plis.

Pour revenir en arrière, Carthage Cement avait au début des difficultés d'exploitation et de trésorerie qui ont bien menacé la continuité de son activité. Le bienfondé de cette situation était induit par un cycle d'investissement assez lourd pour la construction du four du cimentier et qui avait nécessité des appels de fonds récurrents surtout à cause du retard de l'entrée en exploitation.

L'Etat, par le biais d'Al Karama Holding, a accéléré le processus de vente de la société en 2018 dans l'espoir d'une cession à un partenaire stratégique pouvant assurer le sauvetage de la société et lui offrir un élan de croissance tant espéré par les actionnaires.

Toutefois, aucune offre n'a été remise sur la table malgré la présence d'un certain nombre de cimentiers de renommée internationale, en l'occurrence Sicile (Portugal) et OIP (Maroc). A en croire encore une fois les rumeurs du marché, les investisseurs en 2018 se sont montrés réticents quant à la situation financière et sociale de la société ainsi que son endettement qui pesait lourd sur l'équilibre bilanciel de Carthage Cement.

Sur la base de ce scénario, l'Etat et Al Karama Holding ont entrepris les démarches nécessaires pour redresser la situation par une injection de fonds en " Equity " et la restructuration de la dette, programme bouclé en 2020 avant l'ouverture du nouvel appel d'offres. Tous les espoirs étaient portés sur la réussite de la nouvelle tentative de l'Etat surtout que les indicateurs d'activité se sont améliorés et la société a renoué avec les bénéfices.

Les acteurs du marché s'attendaient réellement à une concrétisation de ce nouvel appel d'offres d'autant plus que la présence de trois cimentiers et un investisseur financier de premier rang ne pouvaient que confirmer les espoirs. En se retrouvant au final avec une seule offre déclinée après 7 mois d'attente, nous comprenons que les raisons sont beaucoup plus profondes qu'un simple argumentaire de prix.

Nos investigations réalisées auprès de plusieurs investisseurs potentiels, ont permis de confirmer que Carthage Cement est en possession d'un terrain à vocation agricole exploité en tant que gisement de carrière pour les besoins d'exploitation. Reconnaissant que les lois tunisiennes protègent les terres agricoles et qu'elles n'autorisent la propriété des sociétés anonymes en possession de terrains agricoles qu'à des personnes physiques tunisiennes uniquement, nous comprenons ainsi la principale cause de l'échec des appels d'offres successifs pour la cession de Carthage Cement.

Toute la question, aujourd'hui, est de savoir pourquoi l'Etat s'acharne à céder une société dans une situation " irrégulière ". Ne fallait-il pas procéder au changement de la vocation du terrain agricole en un terrain industriel avant de procéder à la cession d'autant plus que les lois sont claires et aucune objection ne pourrait être remise en cause.

Alors, qu'est-ce qui a empêché l'Etat, durant toutes ces années, de régler ce problème ? Et pourquoi aucun responsable gouvernemental ne voulait-il pas assumer, durant toutes ces années, la responsabilité de prendre la décision de changer la vocation du terrain ? Ces questions restent toujours sans réponse.

Encore une fois, l'économie tunisienne perd des points dans un contexte où la relance de l'investissement est plus que nécessaire pour rattraper le temps perdu. Un autre dossier vraisemblablement renvoyé aux calendes grecques.

Omar El Oudi

Publié le 02/02/22 11:34

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