2024 restera sans nul doute dans les annales de l'histoire économique de la Tunisie, l'année de l'échec de nos mythes économiques.
Par Hachemi ALAYA
Docteur d'Etat en économie
Une année marquée par les errements et les expérimentations hasardeuses d'une gouvernance politique dépourvue de toute rationalité économique qui s'est attelée à bouleverser les institutions pour les tailler à la mesure d'un Deus ex machina qui n'eut de cesse de conduire une politique économique de la table rase fondée sur le compter sur soi, le rejet des élites et des compétences et de tout ce qui procède de l'étranger.
Une doxa fort commode où le rejet du Fonds Monétaire International et la mise à l'index du milieu des affaires justifie l'évacuation de toutes les transformations structurelles dont le pays a besoin pour se redresser et sortir de la crise économique et financière dans laquelle il ne cesse de s'enfoncer.
Une gouvernance qui, de facto, fait obstacle à son objectif de justice sociale
En 2024, la Tunisie s'est bernée de l'illusion qu'elle peut éviter de payer la facture des années de transition vers la démocratie pendant lesquelles elle a vécu au-dessus de ses moyens, en rejetant toute politique de redressement de ses comptes, en recourant sans retenue à l'argent magique et en ignorant superbement la contrainte extérieure qui s'impose à un pays largement ouvert et intégré dans les chaînes de valeur mondiales.
Ce faisant, elle a non seulement aggravé ses problèmes mais aussi sacrifié son avenir, compromis sa croissance, accepté le chômage et la déperdition de ses compétences et fait obstacle à son objectif de justice sociale.
Un bilan macroéconomique décevant
En 2024, la Tunisie n'a toujours pas renoué avec la quantité de richesses qu'elle produisait en 2019
Cinq années après la pandémie de la Covid, la Tunisie n'a toujours pas renoué avec la quantité de richesses qu'elle produisait en 2019. Il a fallu remettre le compteur de la croissance économique 2023 à zéro pour parvenir à exhiber une croissance de 1,4% en 2024.
Une croissance qui est pour l'essentiel un don du ciel : la performance du secteur agricole (+8,3%) n'a d'égal que son effondrement en 2023 (-15,3%). Une croissance économique en trompe-l'œil qui recèle l'effondrement des industries extractives de Tunisie (phosphate, pétrole & gaz), l'empirement de sa crise immobilière, le creusement de son déclin industriel et l'essoufflement de son tourisme.
Le Tunisien, il n'a guère retrouvé en 2024, son niveau de revenu d'il y a plus de dix ans
Une croissance quantitative en trompe-l'œil enfin, qui n'a guère permis de mettre le holà ni à l'aggravation du chômage et la fuite des compétences, ni à la détérioration du niveau de vie matériel du Tunisien. Le taux de chômage s'est aggravé en 2024 par rapport à l'année de la croissance zéro 2023 : 16,0% à la fin du troisième trimestre 2024 contre 15,8% pour la même période de 2023.
Quant au Tunisien, il n'a guère retrouvé son niveau de revenu d'il y a plus de dix ans (7.784 dinars contre 7.833 dinars en 2013 selon les calculs du FMI) et a dû subir l'érosion de son pouvoir d'achat par une inflation restée fort élevée : +7,0% en moyenne en 2024.
La Tunisie, parmi les pays les plus mal gérés du monde
Une gouvernance économique qui a contribué à aggraver les problèmes
Cette détérioration du niveau de vie matériel du Tunisien n'est guère surprenante au vu des errements, des improvisations et de l'irrationalité d'une gouvernance économique qui a de facto, contribué à aggraver les problèmes dont souffre l'économie tunisienne. Une gouvernance économique où les changements initiés et servis comme autant de " réformes " visant à assurer une plus grande équité sociale, n'ont guère permis au Tunisien de " s'élever et s'épanouir ".
La Tunisie figure parmi les pays les plus mal gérés du monde
Un constat qui ressort des rapports annuels de l'Institut Chandler sur la bonne gouvernance dans les pays du monde. Au classement mondial 2025 selon l'indice de bonne gouvernance, la Tunisie a glissé de la 88ème à la 96ème place sur 120 pays.
La Tunisie qui était déjà mal lotie en 2021 (date du premier classement mondial qui a rangé la Tunisie à la 75ème place sur le même nombre de pays) a enregistré un recul de huit places par rapport à l'an dernier et de 21 places depuis 2021. La Tunisie est désormais le pays le plus mal géré d'Afrique du Nord et partage ce titre avec le Liban dans la région méditerranéenne. Sur les 28 pays d'Afrique couverts par le rapport 2025, la Tunisie pointe à la 15ème place à peine mieux que l'Ouganda.
Un "compter sur soi" qui a débouché sur une double illusion : monétaire et financière
Un " compter sur soi " qui, à l'expérience, a débouché sur une double illusion
Ce constat n'est guère surprenant au vu de la doxa doctrinale qui a présidé à la gestion des affaires nationales en 2024. Un souverainisme xénophobe, étatiste et anti-mondialiste brandi à l'origine pour servir de prétexte au refus des conditionnalités du FMI, s'est mué ostensiblement en principe directeur de la politique économique tunisienne.
Une doxa fondée sur un mythe: une économie de petite taille largement ouverte et intégrée dans les chaînes de valeur mondiales, peut -et doit- compter sur ses propres ressources pour subvenir à ses besoins. Notamment, pour sortir du gouffre dans lequel elle s'enfonce depuis bientôt près de deux décennies. Un " compter sur soi " qui, à l'expérience, a débouché sur une double illusion.
Illusion monétaire et illusion financière
L'illusion monétaire d'abord, celle de l'argent magique qui permet à l'État d'entretenir un train de vie dispendieux et de s'adonner à un distributivisme à tous crins au nom de la justice sociale ; l'illusion financière ensuite, celle qui consiste à croire qu'un pays dont la balance des paiements est structurellement déficitaire, peut se passer des capitaux étranger et continuer à vitre au-dessus de ses moyens en puisant dans ses maigres ressources en devises pour combler son besoin besoin de financement extérieur.
Une illusion tragique : l'argent magique
L'État tunisien de moins en moins en mesure d'assumer ses fonctions
En 2024, l'État tunisien s'est heurté aux limites d'une politique fondée sur le " compter sur soi " qui a abouti de facto à un usage extensif de la matraque fiscale et à solliciter de manière excessive le marché domestique pour d'endetter.
Faute de ressources suffisantes, il a dû faire flèche de tout bois pour faire des économies et pour reporter, autant que faire se peut, certaines dépenses. Sur les 60 milliards de dépenses prévues dans le projet budgétaire 2024, il n'a déboursé effectivement que 56,4 milliards de dinars soit, un taux de réalisation effectif de 94,4%.
Il s'est imposé une cure d'austérité qui a porté aussi bien sur les dépenses destinées à assurer le fonctionnement ordinaire des services publics (écoles, hôpitaux, transports collectifs, etc.) que sur les dépenses qui sont moins contraignantes que sont les salaires, les subventions des prix des produits de base et la charge de la dette.
Une austérité contre-productive comme seule boussole
Pour réduire le dérapage du déficit budgétaire, l'État a dû recourir à des coupes budgétaires et restreindre, autant que faire se peut, son train de vie. Il a dû faire flèche de tout bois au prix de départs anticipés à la retraite, de renonciations à certains recrutements et de compression des hausses des salaires, pour contenir la croissance de la masse salariale à 2,6% par rapport à l'année 2023 et la ramener à son plus bas niveau (en pourcentage du PIB) des cinq dernières années: 13,9%.
Il a sciemment limité au strict minimum nécessaire les dépenses requises par le soutien des prix des produits de consommation de masse pour contenir les subventions & autres transferts sociaux à hauteur de 27,2% des dépenses soit, légèrement moins qu'en 2023 et 2022: respectivement, 27,7% et 28,9%. Une cure d'austérité forcée dont l'impact négatif a rejailli sur la qualité des services publics (entretien des écoles, des hôpitaux, des transports publics, etc.).
En effet, les dépenses sur biens & services n'ont représenté que 5,5% des dépenses courantes en 2024 contre 7,2% au cours de la décennie 2010-2019. Impossible de se faire une idée précise des investissements réels engagés par l'État tunisien en 2024, tant les données publiées sont amalgamées dans une rubrique unique " Investissements & paiements directs " ; une rubrique où les dépenses d'investissement côtoient des versements directs de fonds sous formes d'aides directes aux agriculteurs, d'allocations de chômage, de subventions aux entreprises publiques, etc.
À plus de 40% du PIB, un pays tombe dans le " socialisme "
Malgré cela, les dépenses totales de l'État ont continué d'enfler. Elles ont atteint en 2024 un plus haut historique à 46,4% du PIB après 46,0% en 2023 et 41,3% en moyenne des 5 dernières années. Une enflure imputable essentiellement aux dépenses requises par la priorisation de l'objectif de " justice sociale ". Un objectif qui l'a conduit à alourdir la pression fiscale.
Et, de fait, en dépit des hausses successives des taux d'imposition et la fougue du recouvrement de l'impôt, l'État n'a pu engranger que 94,8% des recettes fiscales escomptées soit, le taux de réalisation de son objectif le plus faible des 5 dernières années. Il en est de même des recettes totales qu'il escomptait engranger : sur les 49,2 milliards de dinars prévus dans le projet budgétaire 2024, seulement 47 milliards sont rentrés dans les caisses de l'État soit, un taux de réalisation inférieur aux prévisions : 95,6%.
Au final, malgré la cure d'austérité qu'il s'est imposée et le recours inconsidéré à la matraque fiscale, le déficit budgétaire (provisoire) a terminé l'année à hauteur de -6,6% du PIB soit, moins que les 7,3% des cinq dernières années mais davantage que les -4,4% du PIB de la décennie 2010-2019.
La dette de l'État tunisien continue d'enfler
Faute de ressources suffisantes, l'État a dû recourir à l'endettement pour satisfaire son ambition de justice sociale. En effet, pour boucler son projet budgétaire 2024, l'État a prévu d'emprunter 28,2 milliards de dinars dont plus de la moitié (16,4 milliards) proviendraient de l'extérieur.
Un vœu pieux lorsqu'on érige le comp-ter sur soi au rang de principe directeur d'une politique économique qui viole allègrement les principes et pratiques essentielles pour une gestion économique saine et efficace, une poli-tique à base de gestion déficiente des finances publiques, de réglementations irrationnelles marquées par l'absence de transparence et de participation dans le processus de prise de décision.
Aussi, il n'est guère étonnant que l'État tunisien n'ait réussi à drainer en 2024 que moins de 3,5 milliards de dinars d'emprunts extérieurs soit, le cinquième environ de ce qu'il prévoyait d'emprunter. La carence de l'endettement extérieur a été plus que compensée par le recours à l'endettement intérieur si bien que l'État tunisien a terminé l'année 2024 avec un stock de dette supérieur de plus de 5 milliards de dinars environ à celui de 2023. Un stock qui représente 84,3% du PIB contre 83,0% en 2023 selon les estimations du ministère des Finances.
Satellisation de la Banque centrale de Tunisie et détournement des financements bancaires au profit de l'État
Face au resserrement de l'étau financier international, l'État tunisien a dû se rabattre en 2024 sur le marché domestique pour s'endetter. Un repli sur soi drapé de la vertu du " compter sur soi ", qui a débouché sur la satellisation de jure la Banque centrale de Tunisie et le détournement des financements bancaires au profit de l'État. En succombant au charme vénéneux de la monnaie magique, la politique budgétaire a ôté toute crédibilité à la politique monétaire.
Au royaume où la richesse se confond avec l'endettement
En 2024, la Tunisie a renoué avec la promesse de quelques mages réputés, dont le savoir économique consistait à confondre la richesse et l'endettement. Des mages selon lesquels le déficit budgétaire et la dette publique ne seraient pas un problème mais plutôt la voie passante pour avoir le beurre et l'argent du beurre.
Puisque l'État dispose du monopole de création de sa propre monnaie et qu'il ne peut pas faire faillite, il peut alors conduire son institut d'émission à racheter sans limites, les titres de dette émis par l'État. Foin de l'indépendance de la Banque centrale si celle-ci s'obstine à l'abri de son "indépendance" à conduire une politique monétaire accommodante pour servir une politique budgétaire expansionniste. Un laxisme budgétaire d'autant plus justifié qu'il sert un objectif noble : l'inclusion sociale et la " libération nationale ".
Credo: la Banque centrale est en mesure de créer de la monnaie, gratuitement et sans limite
En bref, la Tunisie a renoué en 2024 avec l'argent magique. Le changement du gouvernement de la Banque centrale de Tunisie en février a été mis à profit pour satelliser l'Institut d'émission et le mettre en ordre de marche pour servir la politique budgétaire.
Pour suppléer l'insuffisance de ses recettes propres et pallier le tarissement des financements extérieurs, le recours au marché domestique est devenu en 2024, la seule voie praticable pour l'État. Elle l'est d'autant plus que pour les pouvoirs publics, la Banque centrale est en mesure de créer de la monnaie, gratuitement et sans limite.
Et de fait, la Banque centrale de Tunisie a bouclé l'année 2024 avec un bilan représentant l'équivalent de 33,0% du PIB soit, dix points de PIB de plus en l'espace de sept ans. Un bilan alourdi par les "créances sur l'État" qu'elle détient; des créances qui représentent désormais 29,1% du PIB contre à peine 4,1% il y a sept ans et moins de un pourcent (0,7%) il y a dix ans.
De leur côté, les banques tunisiennes ont bouclé l'année 2024 avec des financements accordés à l'État en progression de +30,4% par rapport à 2023. En pourcentage du total de leurs actifs, les créances sur l'État tunisien ont plus que doublé en l'espace d'une dizaine d'années : 7,5% à fin 2014.
Une illusion périlleuse : la méconnaissance de la contrainte extérieure
Le " compter sur soi " à l'épreuve de la contrainte extérieure
En 2024, le " compter sur soi " s'est heurté à une autre limite : l'assèchement programmé des avoirs en devises du pays. Le déficit commercial de la Tunisie s'est creusé fortement (plus de 30 milliards de dinars selon les données de la balance des paiements). Un trou béant largement comblé par les excédents dégagés par la balance des services (+22,2 milliards de dinars) et la balance des revenus (+5,3 milliards de dinars).
Malgré cela, la Tunisie a bouclé l'année 2024 avec un déficit de la balance des transactions courantes de près de 2,7 milliards de dinars, un déficit en forte baisse lorsque comparé à la moyenne des cinq dernières années (8,1 milliards de dinars) qui a été obtenu au prix de restric-tions innombrables aux importations (elles ont augmenté de seulement 2,3% par rapport à l'année précédente) qui ont généré des pénuries à répétition sur les produits de consommation de masse tout au long de l'année.
Des restrictions imposées d'une part, par la stagnation des exportations (croissance du PIB nulle en 2024) et de l'autre, par la pénurie de devises induite par le " compter sur soi ".
Un " besoin de financement " extérieur structurel
En effet, et en dépit de sa forte contraction, il n'en reste pas moins vrai que le déficit courant correspond dans le cas tunisien à un " besoin de financement " extérieur du pays. Il indique le volume de capitaux extérieurs que le pays doit mobiliser pour financer son déficit. Des capitaux qui revêtent principalement deux formes : investissements étrangers et/ou recours à l'endettement extérieur.
Or non seulement les investisseurs étrangers sont en train de fuir le pays, mais la Tunisie qui se targue au nom de la préservation de sa souveraineté, de compter sur ses propres ressources et donc, de ne pas recourir à l'emprunt extérieur, est en réalité dans l'incapacité d'emprunter à l'international à des conditions financières soutenables. Son train de vie ne peut désormais être entretenu que par des ponctions sur ses maigres avoirs de réserve.
Les investisseurs étrangers prennent la poudre d'escampette
En effet, cela fait longtemps que les investisseurs étrangers retirent plus de fonds qu'ils n'en investissent entraînant ainsi un assèchement des flux de capitaux susceptibles de combler le besoin de financement du pays sans recours à la dette extérieure.
Et de fait, si les " investissements directs étrangers " révèlent une certaine résilience et ont drainé près de 2,5 milliards de dinars en 2024, les " investissements de portefeuille " (les achats d'actions et d'obligations) ont en revanche, causé une véritable hémorragie de devises : plus de 4,0 milliards de dinars.
Loin de contribuer à combler le déficit extérieur de la Tunisie comme ils le firent depuis des décennies, les investisseurs étrangers prennent la poudre d'escampette. Ils sont devenus source de sorties nettes de devises.
L'alternative au FMI se révèle à l'expérience, désastreuse
Pour faire face à cette nouvelle situation, la Tunisie a dû malgré tout faire flèche de tout bois pour trouver des bailleurs de fonds étrangers. Une voie rendue quasi impraticable depuis qu'elle a choisi délibérément de couper les ponts avec le FMI et de recourir à l'Afreximbank pour satisfaire son besoin de financement.
Une alternative qui, à l'expérience, s'est révélée désastreuse. Sur les deux emprunts (700 millions de dollars en 2022 et 500 en 2024) contractés auprès de cette banque africaine, la Tunisie n'a disposé effectivement que de 450 millions de dollars ; les deux-tiers des prêts obtenus ayant été gelés sous forme de " dépôts de garantie ". Ceci, en plus du fait qu'ils ont coûté plus cher à la Tunisie que les prêts obtenus auprès du FMI.
Outre le recours à Afreximbank, la Tunisie a dû aussi recourir à des financements encore plus coûteux pour s'approvisionner en produits alimentaires et éviter les pénuries. Elle a dû recourir aux crédits commerciaux à court terme. Ceux-ci représentaient moins de 25% de l'endettement extérieur de la Tunisie avant la pandémie de la Covid, 38,5% à la fin de l'année 2024.
Cet état de fait explique pourquoi les capitaux d'emprunt n'ont jamais été aussi peu importants. De fait, la Tunisie n'a pu mobiliser que 4,1 milliards de dinars de capitaux d'emprunts extérieurs (" Autres investissements " dans la balance des paiements) soit, moitié moins que la moyenne des cinq dernières années.
Le dinar tunisien est une monnaie en sursis
Face à l'assèchement des deux principales sources de financements de son besoin de financement extérieur, la Tunisie n'a désormais qu'une seule solution envisageable : puiser dans ses avoirs de réserve. Une voie passante périlleuse pour la Tunisie.
D'abord parce que le stock de devises du pays est maigre (à peine 4 mois de couverture des importations) et à ce rythme, va s'épuiser rapidement. Ensuite, parce que cette solution raréfie les liquidités en devises nécessaires pour financer les importations vitales dont le pays a besoin pour faire tourner ses usines et nourrir sa population.
Enfin, parce que l'épuisement des avoirs de réserve conduit inéluctablement à la dévaluation du dinar et donc à l'exacerbation de la détérioration du pouvoir d'achat du Tunisien. Loin d'être " la monnaie la plus solide d'Afrique ", le dinar tunisien en tant que monnaie d'un pays ayant une balance des paiements courants structurellement déficitaire, est une monnaie en sursis.
Le " compter sur soi " a fini par déboucher sur une accumulation des déficits et donc de la dette
Tout se passe en fin de compte comme si la politique du compter sur soi a fini par déboucher sur une accumulation des déficits et donc de la dette. Sur le plan interne, il a astreint l'État tunisien à recourir à la planche à billets pour financer son déficit budgétaire.
Un choix désastreux parce qu'il s'agit d'une solution qui entretient une inflation élevée (la croissance de la masse monétaire est désormais une mesure plus fiable de l'inflation tunisienne que l'indice des prix à la consommation : +10,7% de hausse en moyenne en 2024) et comporte un risque social et politique élevé.
Sur le plan externe, elle a abouti à puiser dans les avoirs de réserve. Un expédient socialement hautement explosif à très brève échéance car la dévaluation du dinar qui ne manquera pas d'en résulter, ne fera qu'aggraver la détérioration du pouvoir d'achat du Tunisien, particulièrement les catégories à faibles revenus.
En coupant les ponts avec le FMI, la Tunisie a choisi de se faire hara-kiri
De fait, le compter sur soi est une option fondée sur une bévue. Un pays qui a des comptes publics et une balance des paiements extérieurs courants structurellement déficitaires, est un pays dont l'épargne ne suffit pas à financer l'investissement (donc, la croissance) et le déficit budgétaire.
En conséquence, il a un besoin vital d'entrées nettes de capitaux. Il a un besoin impérieux de recourir à l'endettement extérieur. En coupant les ponts avec le FMI, la Tunisie a choisi de se faire hara-kiri. Elle a choisi de sacrifier sa croissance économique, de condamner ses jeunes au chômage et de s'appauvrir.
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Publié le 25/09/25 10:15