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Tunisie : Un projet de Loi de Finances 2020 sous le signe de la transition politique

ISIN : TN0009050014 - Ticker : PX1
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Par Khalil Laabidi, Conseiller des services publics

Quatre jours, après le vote du deuxième tour des présidentielles, le ministère des Finances a mis sur site le projet de loi de finances pour 2020 (le 16 octobre 2019). Le projet a été déposé au parlement le 15 Octobre 2019.

C'est dire que la machine ne s'est pas arrêtée le temps d'une compagne électorale et a pondu dans les délais un projet, allégé sans doute, mais qui suscitera pas mal de discussions lors de son examen par les représentants du peuple fraîchement élus à l'occasion des discussions budgétaires qui aurons lieue avant le 10 décembre 2019, date limite d'adoption du projet de loi par le parlement.

Ce projet arrive dans une période très critique caractérisée cette fois par :

  • Une transition du pouvoir politique dans ses deux volets exécutif et législatif,
  • Des équilibres macro-économiques instables et parfois insoutenables,
  • Une pression continue des institutions internationales pour maitriser encore plus les équilibres macro-économiques et surtout le déficit budgétaire et le taux d'endettement,
  • Une grande pression pour inscrire la Tunisie dans la transparence internationale en matière fiscale et combattre la fraude fiscale et la concurrence dommageable,
  • Un ambre de récession pressenti par certains analystes économiques dans la zone Euro et aux Etats Unis,
  • Un fléchissement des échanges commerciaux internationaux du fait de l'offensive commerciale entre la Chine et les Etats Unis…

En matière de déficit budgétaire on s'achemine en 2019 vers un taux de 3,5% contre 3,9% prévu dans la loi de finances pour 2019. Cette légère amélioration par rapport aux prévisions s'explique par l'amélioration des ressources propres du budget de l'Etat : grimpant de 74% en 2018 à 76,5% en 2019.

Les prévisions du gouvernement tablent sur un déficit qui va passer à 3% en 2020 et à 2,4% en 2021 pour finir à 2% seulement en 2022. Pour y arriver les prévisions de la loi des finances pour 2020 se basent sur les principales hypothèses suivantes :

  • Un taux de croissance de 2,7% aux prix constants comparé à 1,4% selon la dernière mise à jour pour 2019 (les prévisions de la LF 2019 ont tablé sur une croissance de 3,1%),
  • Prix du baril du pétrole brut " Brent " à 65 dollars pour toute l'année 2020,
  • Evolution des importations de marchandises de 9% comparée à 9,7% attendue pour 2019,
  • Le projet n'a pas annoncé de prévisions quant au taux de change du dinar, restant une variable très aléatoire, cela ne veut pas dire que le projet ne se base pas sur une prévision du taux de change, mais pour plusieurs raisons, qu'on comprend, on n'a pas voulu publier cette prévision.

Ainsi, le Budget de l'Etat va culminer les 47.227 millions de dinars enregistrant une progression de +9,5% par rapport à 2019 et aura l'originalité cette année d'une nouvelle présentation rappelant le bilan d'une société c'est-à-dire comportant des recettes et des dépenses ainsi qu'un résultat qui n'est autre qu'un déficit bien évidemment.

Les mesures fiscales (22) ont été regroupées sur les cinq rubriques suivantes :

Poursuite de la réforme fiscale

1- Mise en place d'un régime fiscal pour l'assurance TAKAFUL, assurance selon les normes de la Chariaa islamique, visant à neutraliser l'effet de la fiscalité sur le choix du type d'assurance adopté par l'assuré,

2- Instauration de la possibilité d'enregistrement des écrits et des contrats ainsi que le paiement des droits de timbre par voie électronique. (Les modalités d'application seront fixées par décision du ministre des finances),

3- Instauration de la possibilité d'échange d'avis et de courrier entre les services fiscaux et les contribuables par voie électronique,

4- Détermination des activités de services dans le secteur pétrolier concernées par le taux de l'impôts de 35% et ce par l'imposition de la part des bénéfices provenant de la prestation de services dans le secteur des hydrocarbures prévue par l'article 130.1 du code des hydrocarbures à l'impôt sur les sociétés au taux de 35%,

5- Précision des modes et conditions d'imposition de quelques activités ne répondant pas à l'exigence de " substance économique " au taux d'imposition de 13,5%, par la condition de réalisation d'un minimum de dépenses annuelles et de l'emploi d'un nombre minimum d'agents spécialisés permanents, et ce dans le but d'harmoniser la législation fiscale tunisienne avec les normes de bonne gouvernance internationale en matière fiscale et éviter le classement de la Tunisie en tant que pays non coopératif en matière fiscale. Il s'agit des :

  • Services d'innovation dans la technologie informatique, le développement des logiciels et le traitement des données,
  • Les sociétés de commerce international,
  • Les services logistiques dispensés de façon groupée. Le minimum de dépenses et le minimum d'emploi qualifié permanents serons fixés par décret du ministre des finances : 

6- Précision du champ d'application de la suspension de TVA sur les acquisitions financées par un don dans le cadre de la coopération internationale et ce compte tenue de l'évolution des mécanismes de financement des projets et les dispositions des conventions internationales conclues avec les donateurs dans ce cadre.

7- Amélioration des conditions de bénéfice du régime forfaitaire pour les bénéfices industriels et commerciaux pour les personnes physiques installées dans les régions intérieures du pays et ce par la suppression de la période limitée de bénéfice du régime.

Lutte contre l'évasion fiscale et amélioration du recouvrement

8- Instauration d'un nouveau type de contrôle fiscal appelé " contrôle ponctuel " concernant la situation fiscale du contribuable totale ou partielle au titre d'une période de moins d'un an et avec des procédures simplifiées et des délais limités,

9- Conditionnement de la suspension des décisions de taxation d'office prises sur les impôts non déclarés par le paiement de 20% du principal de l'impôts au lieu de 10% ou la consignation bancaire de 15% actuellement,

10- Instauration de la possibilité de se baser sur les résultats des visites sur terrain et des contrôles inopinés et des constats matériels lors des vérifications préliminaires pour contrôler et redresser les avantages, les réductions d'impôts et les régimes de faveur en matière fiscale avec habilitation des agents du contrôle fiscal pour se procurer copie des documents qui pourrons être utilisés dans le contrôle fiscal.

11- Clarification du champ d'exonération de la TVA au titre de l'importation et l'achat des articles, des pièces et des parties utilisées dans la production, le montage et l'entretien des équipements agricoles et de pèche en instaurant l'obligation de produire une attestation à l'effet délivrée par les services du ministère concerné afin de garantir la bonne application de l'avantage sur les personnes concernées.

12- Conditionnement du bénéfice des incitations fiscales et des régimes suspensifs au profit des entreprises et des personnes redevables de créances douanières inscrites au registre du receveur des douanes et dont le délai de paiement a dépassé les deux ans, par le paiement desdites créances ou la souscription d'un échéancier de paiement.

Appui à la compétitivité de l'entreprises et encouragement de l'investissement

13- Poursuite de la maîtrise du coût de production du secteur de l'agriculture et de la pèche et renforcement de la compétitivité des entreprises de production des équipements utilisés par ledit secteur, par l'octroi du régime suspensif aux intrants suivants :

- Fil polyester, nylon et polyamide utilisés pour la fabrication et l'entretient des filets et des cordes nécessaires pour la pèche.

- Les filaments en acier destinés à la fabrication des cordes en fer ou en acier ou en combiné destinées à la pèche. Les conditions et procédures d'application de cette mesure ferons l'objet d'un décret gouvernemental.

14- Prolongation des dispositions de la loi n°29-2010 concernant l'encouragement des entreprises à introduire leurs actions à la bourse des valeurs mobilières. Ces dispositions ont pour objet d'octroyer aux sociétés, qui introduisent leurs actions ordinaires à la BVMT avec un taux d'ouverture au public de 30% au minimum durant la période allant du premier janvier 2010 au 31 décembre 2019, une réduction du taux de l'impôts sur les sociétés de 20% pour une période de 5 ans à compter de l'année d'introduction des actions en bourse et ce jusqu'au 31 décembre 2024.

Cette mesure s'applique aussi sur les sociétés qui introduisent leurs actions ordinaires au marché alternatif et selon les mêmes conditions ; Elle s'applique également sur les sociétés soumises à l'impôt sur les sociétés au taux de 25% et qui introduisent leurs actions en bourse à compter du premier janvier 2017 dans le cadre de ladite loi, elles bénéficient, ainsi, de la réduction du taux de l'impôt sur les sociétés à 15%.

Mesures à caractère social

15- Relèvement du plafond de déduction, pour la détermination de l'impôt sur le revenu des personnes physiques, au titre des parents qui sont à la charge du contribuable de 150 dinars à 450 dinars annuellement et ce au titre de chaque parent à charge.

16- Appui à l'association tunisienne des villages d'enfants (villages SOS pour les enfants orphelins et/ou sans appui familial) et ce par :

  • L'admission en déduction totale de la base de l'impôt sur les sociétés ou l'impôt sur le revenu des personnes physiques, des aides et dons qui lui sont octroyés,
  • L'autorisation accordée aux opérateurs téléphoniques pour la déduction la TVA ayant grevé les montants des messages téléphoniques de mobilisation pour la collecte des dons au profit de ladite association et l'exonération desdits opérateurs de la redevance sur les télécommunications au titre des mêmes messages : 

17- Exonération du droit d'enregistrement proportionnel dû sur la vente de biens immobiliers, des acquisitions faites par les offices de logements des agents publics de locaux réservés au logement et ce lorsque lesdites acquisitions sont faites auprès des promoteurs immobiliers en vue de leur revente aux adhérents desdits offices conformément à leur objet social.

La revente de ces locaux par les offices de logement publics à leurs adhérents est considérée comme une opération de cession d'immeuble par un promoteur immobilier et reste, ainsi, éligible à l'avantage fiscal au titre des acquisitions de logements auprès des promoteurs immobiliers (Transmission d'avantage).

18- Généralisation de la réduction du taux de la retenue à la source de 15% à 5% applicable sur les rémunérations des artistes et des créateurs au titre de la production, la diffusion et la présentation des œuvres théâtrales, scénique, musicales, littéraires et plastiques, aux rémunérations payées aux artistes de cinéma ainsi que les rémunérations payées aux titulaires de droits d'auteurs et des droits annexes dans le cadre de la gestion collective des droits de la propriété littéraire et artistique.

Mesures diverses

19- Enregistrement des marchés publics relatifs à l'exécution des travaux, aux prestations de services, à la fourniture de biens ou à la préparation d'études ayant un caractère secret par le biais d'une déclaration spéciale fournie par l'administration et ce dans le but de préserver le caractère secret desdites prestations et fournitures sur la base d'une décision du ministre des finances ou de toute personne dûment mandatée par le ministre des finances à cet effet.

20- Exonération de la société " El Fouledh " du paiement du droit dû sur l'exportation de la ferraille métallique fixé à 270 dinars la tonne et ce durant la période : 2020 – 2021 et dans la limite d'un contingent de 100 mille tonnes.

21- Harmonisation du taux de la pénalité de retard en matière douanière avec le taux de la pénalité de retard sur les créances fiscales de l'Etat fixé par le code de la comptabilité publique à 0,75% par mois ou fraction de mois.

22- Création d'un fonds spécial de soutien à la justice pour le renforcement les infrastructures et la modernisation des conditions de travail dans les tribunaux ainsi que la motivation des compétences judiciaires et les greffiers à y prendre part tout en facilitant l'accès à la justice. Ce fonds sera financé par une contribution d'appui à la justice, crée à cet effet, d'un montant à 10 dinars sur tous les jugements et arrêts ainsi que les injonctions de payer et les ordonnances sur requêtes émises par les différents tribunaux à l'exception de quelques exonérations.

Publié le 28/10/19 11:30

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