Tunisie - Secteur bancaire : A quoi s'attendre en 2018 et 2019 ?

L'intermédiaire en Bourse MAC SA vient de rendre public une étude sur le secteur bancaire coté, ses réalisations au terme des neuf premiers mois de l'année en cours et les prévisions pour 2018 et 2019. L'étude, intitulée "Secteur bancaire coté : Naviguer à travers les changements", porte sur 10 banques parmi les 12 cotées à la Bourse de Tunis (hors Wifak Bank et la BTE).

Malgré un contexte économique encore fragile, et un fort resserrement des liquidités sur le marché, l'encours des dépôts cumulé du secteur s'est élevé à 58,2 milliards de dinars au 30 septembre 2018, en hausse de 4% par rapport à fin décembre 2017, suite à l'intensification des efforts commerciaux des banques.

Grâce à son réseau d'agences étendu (207 agences à fin 2017), la croissance la plus importante et la plus significative a été affichée par Attijari bank que ça soit en absolu (+797 MDT) ou bien en relatif (+13,3%) se détachant ainsi du reste de ses consœurs. Deux autres banques ont aussi réussi à dépasser la croissance sectorielle moyenne de l'encours des dépôts à savoir la BT avec 9,4% et l'UIB avec 9,1%.

En termes de part de marché des dépôts, la BIAT occupe toujours la première place avec une part de 18,6%, suivie de loin par la BNA avec une part de marché de 12,9% et Attijari bank avec 11,7%.

Malgré une économie sous pression, les banques ont continué à accroitre leur encours de crédits qui s'est élevé à 62,86 milliards de dinars contre 59,16 milliards au 31 décembre 2017, marquant une progression de 6,2%. Quasiment toutes les banques ont enregistré une évolution positive des crédits, à l'exception de l'Amen Bank qui semble ralentir la cadence pour mieux assainir son portefeuille (même si le repli reste peu important).

Alors que la STB et la BH ont enregistré des croissances à deux chiffres de leurs encours des crédits, soit 10,5% et 10,4% respectivement, les autres banques ont affiché des croissances moins accélérées. En troisième position, vient la BNA avec un taux de croissance des crédits de 8,2%, talonnée par Attijari Bank qui se place en quatrième position, avec une évolution des crédits de 6,7%.

En valeurs, ce sont les trois banques publiques qui ont le plus contribué à l'accroissement de l'encours des crédits avec respectivement 801 MDT pour la BH, 712 MDT pour la BNA et 641 MDT pour la STB. En quatrième position, on trouve la BIAT avec une contribution de 602 MDT.

Des revenus en nette progression

Comme c'était prévisible, les revenus des banques ont été en nette hausse courant les neuf premiers mois de 2018 favorisés surtout par la nette progression des revenus d'intérêt. En effet, la marge d'intérêt a progressé de 28,4% par rapport au 30/09/2017 sous le poids d'un effet prix provenant de la hausse du TMM (177 points par rapport à la moyenne des neuf premiers mois 2017) alors qu'au niveau volume, l'activité commerciale des banques a été en faible croissance durant les neuf premiers mois de l'année en cours.

Ainsi, la liquidité des banques a été encore sous pression avec un ratio dépôts /crédits de 92,6% mais seulement 3 banques (ATB, Attijari bank et BIAT) arrivent à avoir un ratio supérieur à 1.

Du côté du PNB, l'encours total cumulé du secteur se chiffre à 3,059 milliards de dinars au 30 septembre 2018, en hausse 18,1% par rapport à la même période de 2017. Confirmant son dynamisme entamé depuis 2017, la BNA a enregistré la plus importante croissance du PNB, soit une hausse de 29,4% alimentée par une remarquable croissance de 41% de la marge d'intérêts et de 30% pour la marge sur commissions. L'UIB a affiché une hausse de 23,1% de son PNB et en troisième position, on trouve Attijari bank dont le PNB a bondi de 20,5%.

Un autre fait à signaler courant ce troisième trimestre de l'exercice 2018, c'est que le PNB du secteur a été en baisse de 2.3% par rapport au deuxième trimestre 2018.

En termes de classement, la BIAT se positionne en tête avec une marge d'intérêt de 330 MDT à fin Septembre 2018 soit une évolution de 30% par rapport à la période correspondante en 2017, détenant une part de marché de 21,5%. La BNA garde la 2ème position avec une PDM de 15,3% et une marge d'intérêt de 234 MDT, en enregistrant la plus forte progression soit 40,7%.

A quoi s'attendre en 2018 et 2019 ?

Un besoin très fort de liquidité est ressenti à tous les niveaux. La masse de la monnaie en circulation a franchi la barre des 12 milliards de dinars à fin juin, le taux de liquidité est de 72% et le niveau de refinancement des banques ayant atteint des niveaux historiques : 17 milliards de dinars au premier semestre 2018, soit plus de 3 fois le niveau de 2010. Cet assèchement crée une concurrence accrue auprès des banques pour la collecte des dépôts provoquant une surenchère tarifaire.

Malgré la stabilité du taux d'inflation à 7,4% au mois d'octobre 2018, les professionnels s'attendent à un relèvement d'ici la fin de l'année du taux directeur de la BCT après ceux opérés en mars (+75 points à 5,75%) et en juin (100 points à 6,75%), ce qui induira un relèvement aussi du TMM (qui se situe à 7,27% à fin octobre 2018).

Une telle hausse aura un effet mitigé sur les banques qui verront leurs revenus d'intérêts s'accroitre d'une part (pour les anciens crédits) mais freinera la demande pour les nouveaux crédits, d'autre part. Une telle hausse des taux entrainera aussi un renchérissement des coûts des ressources pour les banques, ce qui impactera la marge d'intérêts.

L'année 2018, est la première année de mise en place de la contribution des banques au Fonds de garantie des dépôts (0,3% de l'encours des dépôts). Une charge qui a impacté le coefficient d'exploitation des banques.

Les analystes de MAC SA s'attendent ainsi à ce que les banques se concentrent davantage sur la maîtrise des coûts en 2018 et 2019 pour atténuer les pressions sur la rentabilité. La maîtrise des couts, l'efficacité opérationnelle, la digitalisation et l'innovation seront les maitres mots pour les années à venir pour que les banques continuent à s'assurer une rentabilité soutenue.

Publié le 15/11/18 10:06