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Suite aux différentes actions menées par les intervenants sur le marché financier tunisien, un texte relatif aux infractions propres aux marchés financiers a, finalement, vu le jour. Le règlement du CMF relatif à la lutte contre les manquements sur le marché a été promulgué par arrêté du ministre des Finances du 28 mars 2017.
Largement inspiré de la directive 2003/6/CE du Parlement européen et du Conseil de l'Union Européenne, ce nouveau règlement du CMF vise à regagner la confiance du public dans le marché des valeurs mobilières en Tunisie.
Le nouveau règlement, comportant 27 articles répartis en 3 Titres, fixe les règles de prévention et les sanctions applicables aux manquements relatifs à l'information privilégiée et à la manipulation de marché commises sur les valeurs mobilières admises à la cote de la BVMT ainsi que celles relevant du marché hors cote qui sont négociées sur le système électronique.
Avant de fixer ces règles, l'article 2 du nouveau règlement a été consacré à la définition des termes utilisés au niveau du texte réglementaire. C'est ainsi que des notions telles que "initié", "Information privilégiée" ou "Transaction sans justification économique" ont été définies par la réglementation tunisienne. Toutefois, nous remarquons que le législateur a donné une nouvelle définition à la notion de "Actionnaire de référence" différente de celle présentée au niveau de l'article 102 de la loi numéro 2016-48 du 11 juillet 2016, relative aux banques et aux établissements financiers.
Les manquements relatifs à l'information privilégiée
Le Titre premier du nouveau règlement consacré aux manquements relatifs à l'information privilégiée est composé de deux chapitres : un premier chapitre qui traite des interdictions des opérations liées à une information privilégiée et un deuxième chapitre présentant l'ensemble des mesures préventives aux manquements liés à l'information privilégiée.
Ainsi, et conformément aux dispositions des articles 3 et 4 du nouveau règlement, il est interdit à tout initié de :
Le règlement liste les personnes physiques auxquelles s'appliquent ces dispositions dans le cas où l'initié est une personne morale.
L'article 5 du nouveau règlement ajoute qu'il est interdit, à toute personne autre que les initiés, d'utiliser ou de communiquer une information privilégiée lorsque cette personne savait ou aurait dû savoir que l'information était privilégiée.
Le chapitre deux du Titre 1 a mis à la charge des sociétés cotées, des intermédiaires en bourse, des sociétés de gestion de portefeuilles des valeurs mobilières pour le compte de tiers, à la BVMT, à Tunisie Clearing (ex STICODEVAM) ainsi qu'aux dirigeants de toutes ces sociétés, un ensemble de mesures à prendre afin de prévenir les manquements liés à l'information privilégiée.
Ces sociétés sont désormais tenues, entre autre, d'établir, mettre à jour et tenir à la disposition du CMF une liste des personnes placées sous leur autorité ou agissant pour leur compte et ayant accès de manière régulière ou occasionnelle aux informations privilégiées concernant directement ou indirectement une société ou une valeur mobilière et ce selon un modèle fixé en annexe du nouveau règlement.
Par ailleurs, les sociétés dont les valeurs mobilières sont admises à la cote de la bourse ou relevant du marché hors cote qui sont négociées sur le système électronique doivent définir des périodes pendant lesquelles les personnes exerçant des responsabilités dirigeantes et toute personne ayant accès aux informations privilégiées devraient s'interdire d'effectuer des transactions sur les titres de la société.
Pour ces sociétés, doivent notamment être considérées comme périodes d'interdictions la période comprise entre la date à laquelle la société a connaissance d'une information privilégiée et la date à laquelle l'information est rendue publique ainsi que la période de 15 jours précédant les dates auxquelles les comptes annuels, les états financiers intermédiaires et les indicateurs d'activités trimestriels de la société sont rendus publics.
Les personnes exerçant des responsabilités dirigeantes au sein de ces sociétés doivent, au plus tard 7 jours de bourse après leur entrée en fonction, déclarer, au CMF le nombre de valeurs mobilières, émises par lesdites sociétés, qu'elles détiennent. Cette obligation de déclaration est applicable, également, aux personnes ayant un lien avec les personnes ci-dessus citées.
Toutes ces personnes doivent déclarer, à la fin de chaque mois, au CMF et à la société, les opérations d'acquisitions, cessions, souscriptions ou échanges d'actions effectuées pour leur propre compte et portant sur les valeurs mobilières émises par ladite société. Les opérations significatives telles que définies au niveau de l'article 14 doivent être déclarées au CMF, à la BVMT et à la société dans un délai de 3 jours de bourse suivant leur réalisation. La BVMT doit publier sans délai la déclaration reçue sur son site internet.
Les manquements relatifs à la manipulation de marché
Le titre II du nouveau règlement du CMF a été consacré aux manquements relatifs à la manipulation de cours ainsi qu'à ceux relatifs à la diffusion d'une fausse information.
L'article 16 dudit règlement interdit à toute personne, agissant seule ou de manière concertée, d'exercer des manœuvres entraînant ou même susceptibles d'entraîner une manipulation de cours.
Constituent des manœuvres entraînant ou susceptibles d'entraîner une manipulation de cours, au sens du nouveau règlement le fait :
L'article 17 donne des exemples d'agissements considérés comme des manipulations de cours (émettre au moment de l'ouverture ou de la clôture ou, le cas échéant, lors du fixing, des ordres d'achat ou de vente ayant pour objet d'entraver l'établissement du prix sur le marché ou pour effet d'induire en erreur les investisseurs agissant sur la base des cours concernés, donner une fausse impression au marché en effectuant une transaction ou une série de transactions afin de donner l'impression d'une forte activité ou d'un mouvement de cours, via des transactions sans justification économique apparente ou des transactions sur une valeur mobilière qui n'entraînent pas un transfert effectif de propriété…)
L'article 21 du nouveau règlement a conféré au CMF le droit de demander à toute personne ayant transmis des ordres sur le marché de lui expliquer les raisons et les modalités de cette transmission.
Quant aux manquements relatifs à la diffusion d'une fausse information, l'article 22 du règlement interdit à toute personne de diffuser des informations fausses ou trompeuses, que ce soit par l'intermédiaire des médias, dont l'internet, ou par tout autre moyen, concernant des valeurs mobilières ou la société émettrice de celles-ci, ou de répandre des rumeurs concernant des valeurs mobilières ou la société émettrice de celles-ci, qui donnent ou sont susceptibles de donner des indications fausses ou trompeuses sur les valeurs mobilières ou la société émettrice de celles-ci alors que la personne ayant divulgué une telle information ou répandu une telle rumeur savait ou aurait dû savoir que les informations étaient fausses ou trompeuses.
L'article 23 ajoute qu'il est interdit aux personnes exerçant des responsabilités dirigeantes de dissimuler des informations concernant des valeurs mobilières ou la société émettrice de celles-ci, dans le but d'influencer le cours de la valeur mobilière concernée ou d'inciter une autre personne à acheter ou vendre cette valeur mobilière.
Obligations de déclaration des opérations suspectes
L'article 24 du nouveau règlement stipule que la BVMT, les intermédiaires en bourse et tout collecteur d'ordre sont tenus de déclarer sans délai au CMF, toute opération dont ils ont eu connaissance et qu'ils ont des raisons de suspecter qu'elle pourrait constituer un manquement tel que défini par ledit règlement.
Cette déclaration doit obligatoirement contenir les raisons qui portent à croire que les opérations déclarées constituent un manquement.
Les déclarants n'encourent aucune responsabilité du fait que cette déclaration est couverte par le secret professionnel prévu par l'article 53 de la loi numéro 94-117.
Sanctions
Les sanctions prévues au niveau de l'article 40 de la loi numéro 94-117 sont applicables à toute personne qui enfreint ce nouveau règlement.
Le CMF peut prononcer à l'encontre des auteurs des pratiques contraires aux dispositions du nouveau règlement une amende au profit du Trésor Public qui ne peut excéder 20.000 dinars. Lorsque des profits ont été réalisés, cette amende peut atteindre le quintuple du montant des profits réalisés.
Par Sofiène WERIEMI
Expert Comptable
Associé Auxilium Consulting
Publié le 11/04/17 08:36
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